Nobiliaire et armorial de Bretagne/Postface

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POSTFACE

de l’édition de 1862.



Voici quelques nouveaux éclaircissements sur l’esprit qui a présidé à la rédaction de l’ouvrage que nous terminons et sur les pièces justificatives que contient le dernier volume. Nous répondrons en même temps à certaines objections qui nous ont été adressées dans le cours de notre publication. Ainsi l’omission de plusieurs noms inscrits dans l’Armorial de Guy le Borgne, n’est qu’apparente. Elle provient de ce que cet auteur ne désigne souvent les familles que sous un nom de terre, au lieu du nom patronymique délaissé par des branches cadettes sorties d’une même souche, lesquelles conservaient leurs armes primordiales, ou les modifiaient légèrement par l’adjonction d’une brisure.

L’usage, fort répandu jusqu’au xve siècle, de changer de nom sans changer d’armes, et vice versâ, nous a déterminé à indiquer pour chaque article les armes identiques appartenant à des familles de nom différent, mais possessionnées dans les mêmes paroisses ou dans des paroisses voisines. Quand l’identité d’origine ou l’alliance entre ces familles n’est pas marquée, les renvois d’un nom à un autre ne sont donnés qu’à enquerre, c’est-à-dire pour rechercher les causes de cette similitude ou rapprochement d’armoiries.

On s’est également étonné que nous ayons rejeté parmi les généalogies suspectes et même fabuleuses, celles délivrées par les rois d’armes d’Irlande. Les raisons de ce rejet ont été nettement expliquées par une plume au moins aussi compétente que la nôtre ; aussi ne pouvons-nous mieux faire que de citer textuellement les déductions de M. le comte E. de Cornulier :

« Les preuves, en matière généalogique, sont chose assez délicate, et il est remarquable qu’à l’époque où ces preuves avaient une valeur réelle, chacun n’acceptait que les décisions des juges de son choix. Ainsi le Roi, pour les honneurs de sa cour, ne s’en rapportait qu’au généalogiste de ses ordres, sans tenir aucun compte des jugements de ses Intendants non plus que des arrêts de ses cours souveraines, pas même de ceux de son Conseil. Hors du palais du prince, le généalogiste de la cour était sans autorité. Les États de Bretagne n’acceptaient que les arrêts de leur Parlement et rejetaient même ceux du Conseil ; enfin chaque chapitre noble ne s’en rapportait qu’à ses commissaires sur la naissance de ses candidats. Toutes ces preuves n’avaient pas la même valeur morale : aussi M. de Courcy a-t-il soigneusement désigné l’origine de chacune d’elles. Les plus suspectes de toutes, comme il le déclare, étaient celles qui reposaient sur un arrêt du Conseil. C’est là que firent reconnaître leur qualité presque toutes les familles irlandaises émigrées à la suite des Stuarts et dont un grand nombre furent naturalisées en Bretagne. Il n’est pas douteux que la naissance de la plupart de ces émigrés ne fût très distinguée ; mais ils produisaient généralement des généalogies remontant au viiie ou au ixe siècle. En présence de pareilles prétentions, M. de Courcy s’est abstenu de toute citation antérieure à leur établissement en France. Ce silence lui était commandé par les décisions du Parlement.[1] »

Ces généalogies, dit-on, sont certifiées par les rois d’armes d’Irlande ; mais il est bon de noter que, depuis leur institution moderne, ils acceptèrent sans contrôle toutes les déclarations des familles qui firent inscrire leurs généalogies dans leurs dépôts. La plupart sont d’ailleurs dressées par Jacques Tirry-Athlon, qui exerçait sa charge en France à la suite du roi Jacques. Aussi se garde-t-il d’indiquer le lieu d’où il date ses certificats, pour ne pas montrer qu’il n’a pas à sa disposition, à l’étranger, les titres originaux dont il délivre néanmoins des expéditions.

« Il est impossible (lit-on dans un rapport de 1776 sur la requête d’une famille irlandaise, pour avoir entrée aux États) d’avoir plus de confiance dans les généalogies dressées par le roi d’armes d’Irlande que nous n’en aurions dans celles qui, ayant été dressées par le juge d’armes de France, nous seraient présentées dénuées de pièces et de titres nécessaires pour la preuve de chacun des degrés qui y seraient articulés. L’office d’Ulster ou roi d’armes d’Irlande n’a été établi dans ce royaume qu’en 1551, et il n’est cependant pas rare de voir sortir du bureau de cet officier des généalogies qui remontent jusqu’au ixe siècle. Cela ne pourrait être s’il n’était pas libre à tous ceux qui le veulent, de faire inscrire sur les livres de remembrance du bureau héraldique leurs noms et même leurs généalogies sans représentation des titres au soutien, par le roi d’armes ou ses commis, qui ensuite en délivrent des expéditions à tous ceux qui en demandent et ne certifient que la vérité, en les déclarant extraites de leurs mémoriaux. Les attestations dont ces expéditions sont ensuite revêtues, quelque éminente que soit la qualité de ceux qui les donnent, ne peuvent inspirer plus de confiance dans ces sortes de généalogies ; elles ne font qu’attester l’état et les fonctions du roi d’armes, sans certifier même la vérité de sa signature.[2] »

Devant ces considérants de M. de Robien, procureur-général-syndic des États, on reconnaîtra que les généalogies irlandaises, quoique délivrées avec un grand appareil de formes authentiques, ne sont en définitive que la copie de documents sans autorité, et l’on ne s’étonnera plus que nous nous soyons abstenu, dans un ouvrage sérieux, de reproduire des filiations remontant à une époque l’hérédité des noms n’était même point encore établie[3].

Aux pièces justificatives annoncées, nous avons joint les listes, la plupart inédites, des chevaliers de l’Hermine, de Saint-Michel et du Saint-Esprit, celles des grands-croix et commandeurs de Saint-Louis et celles des gouverneurs et intendants de Bretagne, qu’on sera bien aise de trouver dans notre recueil. Quant aux listes d’évêques et d’abbés, comme elles sont insérées dans plusieurs catalogues spéciaux qu’on peut facilement consulter[4], nous avons pensé qu’ayant mentionné, à l’article de chaque famille, les évêques ou abbés qu’elle avait pu donner à l’Église de Bretagne, il devenait inutile de reproduire ces noms rangés par sièges épiscopaux ou abbatiaux, à l’exception toutefois des familles bretonnes qui ont fourni des dignitaires ecclésiastiques hors de la province. Cette dernière liste, nous l’avons rédigée sur la Gallia christiana et les diverses éditions de la France ecclésiastique, et elle voit le jour pour la première fois.

On s’occupe aujourd’hui de publier les rôles des gentilshommes convoqués dans les différents bailliages pour l’élection aux États généraux de 1789. On veut obtenir ainsi une statistique de la noblesse à cette époque ; on se propose même de lui donner un caractère officiel en vue de la loi du 28 mai 1858. Nous ne pensons pas qu’on arrive de la sorte à dresser un état complet de la noblesse, parce qu’il n’y eut de convoqués que les gentilshommes majeurs et possédant des fiefs nobles, ce qui implique beaucoup d’exclusions. Ces listes n’en conservent pas moins une grande valeur ; mais elles n’existent pas pour la Bretagne à la suite des procès-verbaux des ordres du clergé et de la noblesse réunis à Saint-Brieuc en avril 1789. Pour y suppléer, nous publions les noms de toutes les familles qui ont eu des représentants dans l’ordre de la noblesse, aux assises des États de la province depuis 1736, en citant la date de la plus ancienne tenue à laquelle un membre de chaque famille a assisté. Jusqu’à cette époque il suffisait aux gentilshommes, appelés ou non par lettres du Roi, d’être originaires de la province ou d’y posséder des biens pour se présenter à ces assemblées. Mais une déclaration du Roi du 26 juin 1736 prescrivit que nul à l’avenir n’aurait entrée et voix délibérative dans l’ordre de la noblesse, avant l’âge de vingt-cinq ans accomplis et sans justifier de cent ans de noblesse au moins, à peine contre les contrevenants d’être exclus de l’assemblée et d’avoir leurs noms rayés sur les registres. La même déclaration enjoignait aux commissaires des États de tenir la main à cette double obligation, par la représentation des extraits baptistaires « et des titres de ceux qu’ils estimeraient être dans ce cas. »

Il semblerait donc que la preuve la plus irrécusable d’extraction noble devrait être d’avoir été admis aux délibérations de l’ordre de la noblesse à partir de 1736. Mais il parait que les commissaires ne se montrèrent pas constamment sévères dans leurs enquêtes, car on remarque qu’il se glissa à diverses tenues quelques membres, peu nombreux, il est vrai, appartenant à des familles déboutées à la Réformation de 1668 et non réhabilitées ; d’autres dont les ascendants n’avaient même pas été assignés à justifier devant la chambre de réformation de leur qualité avantageuse, et un plus grand nombre fort éloignés d’une noblesse centenaire, ainsi qu’on peut le constater en confrontant ces noms avec le texte du Nobiliaire. Le nombre de ceux qui n’avaient pas toutes les qualités requises par la déclaration de 1736 n’est d’ailleurs que le vingtième environ du chiffre total des votants.

Nous ne savons quelle conclusion tirer de cette infraction à une ordonnance royale, par les agents spécialement chargés de la mettre à exécution, à moins que par cette facilité d’admission, qui se prolongea jusqu’au nouveau règlement de 1770, ils ne voulussent gagner des voix dans l’assemblée au profit de la Cour et s’assurer d’une majorité pour certains votes difficiles à enlever. C’est sans doute par des motifs semblables que le Roi adressait des lettres de convocation à plusieurs personnes influentes qu’il avait des raisons particulières de voir assister aux États. Dans le Parlement anglais cette tactique est encore usitée et nous ne serions pas surpris que les mêmes causes motivassent la présence aux tenues d’États de quelques noms inscrits aux fins de l’ordonnance du gouverneur de la province, après la liste générale arrêtée et signée par les trois présidents des ordres. Ces dernières inscriptions ne font point preuves de noblesse ; « les ordonnances des gouverneurs ne peuvent être considérées que comme provisoires, seulement pour la tenue qui en a été l’objet. La provision qu’ils avaient accordée, ils eussent pu la refuser à la tenue suivante[5]. »

En 1770 intervinrent, sur la demande des États, d’autres lettres patentes, ordonnant que les originaires et extra-provinciaires qui, n’ayant pas produit ou ayant été déboutés lors de la Réformation de 1668, n’auraient obtenu de jugements confirmatifs que depuis 1696, par lettres patentes, arrêts du Conseil ou ordonnances des Intendants, seraient tenus de se pourvoir devant le Parlement, d’y produire leurs titres et d’y faire juger, contradictoirement avec le Procureur-général-syndic des États, s’ils avaient les qualités requises par la déclaration de 1736[6].

Ce dernier règlement fut rigoureusement appliqué, et depuis 1770 on ne voit plus aux États d’entrées de faveur, en sorte que plusieurs familles figurent pour la dernière fois à la session de 1768-1769 et auraient été exclues aux tenues suivantes, si elles s’y étaient présentées.

Une autre réflexion qui naît de la lecture de ces listes, c’est que sur 2,084 familles maintenues aux Réformations de 1668-1696, la moitié ne s’est rendue à aucune des trente assises, tant ordinaires qu’extraordinaires, tenues depuis 1736. L’abstention ne doit donc pas faire préjuger d’une manière absolue de la qualité d’une famille, car il n’y avait pas peine de radiation, ni de déchéance contre les absents. La présence aux États était un droit pour les gentilshommes et non une obligation. Il faut bien admettre aussi des abstentions forcées, comme la minorité chez les uns, le manque de fortune, l’exercice du commerce ou tout acte de dérogeance chez les autres, l’âge, la difficulté et la lenteur des moyens de transport, et dans beaucoup de cas la profession des armes. Un officier de marine naviguait ; un officier de terre était à la guerre ou en garnison à l’extrémité de la France. Les gentilshommes de la Basse-Bretagne se rendaient rarement aux tenues assignées à Rennes ou à Nantes ; ceux de la Haute-Bretagne étaient au contraire en minorité aux États de Vannes ou de Morlaix. En résumé, les preuves de noblesse tirées de la présence aux États ne peuvent être invoquées par toutes les familles, même d’ancienne extraction, tandis que toutes celles préalablement déboutées et celles d’origine étrangère à la province, dès qu’elles avaient obtenu un arrêt de réhabilitation ou de maintenue au Parlement, s’empressaient d’user de leur droit et de se rendre à ces assemblées.

Les noms, prénoms et évêché de chaque membre étaient inscrits sur les registres du greffe ; mais en donnant ensuite leurs adresses à l’imprimeur des États, quelques gentilshommes faisaient précéder leur nom d’un titre plus ou moins arbitrairement porté. Ces titres ne figurent pas sur les registres originaux et sont même entièrement proscrits de plusieurs listes imprimées, comme ils le sont des listes du Parlement et de la Chambre des Comptes.

L’esprit égalitaire était tel parmi la noblesse, que les gentilshommes ne voulaient admettre entre eux aucune supériorité et ne reconnaissaient en fait de titres que les neuf baronnies dites d’États.

On remarquera aussi l’interdiction, pour les membres du Parlement, de siéger aux États, dont il avait à exécuter ou même à contrôler et suppléer les décisions.

Le Parlement était tout à la fois un corps judiciaire et politique ; à propos de l’enregistrement des édits du Roi, il examinait leur constitutionnalité et prononçait entre les États et le Pouvoir exécutif ; il devait donc n’être engagé ni envers les États ni envers le Pouvoir, pour ne pas avoir à prononcer dans une cause où il aurait été juge et partie. C’est comme attachés au Parlement que les secrétaires du Roi n’entraient pas non plus dans les assemblées d’États, et, dans un ressort moins étendu, puisqu’il se bornait aux matières financières seulement, la Chambre des Comptes avait les mêmes incompatibilités. On voit par là qu’avant 1789 les idées vraiment libérales étaient, à certains égards, plus avancées que de nos jours, où nous avons vu le budget voté par ceux-là même qui y prenaient la plus large part.

Les dernières assises des États ouvertes à Rennes le 29 décembre 1788, furent suspendues par un arrêt du Conseil du 7 janvier 1789, qui les ajournait au 3 février. La noblesse, malgré l’ordre de dissolution auquel le Tiers s’était soumis, continua de siéger aux Cordeliers de Rennes jusqu’au 1er février, nonobstant l’émeute dont le siège de ses délibérations avait été, les jours précédents, le sanglant théâtre. Notre relevé s’arrête à la tenue précédente de 1786, car on ne retrouve pas la liste des membres qui prirent part à la dernière représentation solennelle des anciennes franchises bretonnes. Nous disons la dernière, puisque l’ordre du Tiers refusa de s’associer aux délibérations et aux votes des deux autres ordres réunis au mois d’avril suivant à Saint-Brieuc, pour la nomination des députés aux États généraux de France. Le Tiers voulait être convoqué par sénéchaussées, et non en corps d’États conformément à ce qui s’était de tout temps observé, et à ce qui était écrit dans les constitutions de la Bretagne.

La noblesse protesta, appela les anoblis de la province et ceux qui avaient la noblesse transmissible à adhérer à ses protestations, et se sépara le 19 avril, après avoir déclaré que la convocation de deux ordres sans le Tiers étant inconstitutionnelle, il n’y avait pas lieu d’élire des députés aux États généraux. Elle ordonnait en même temps le dépôt, aux archives des États, de ses protestations en faveur des droits, franchises, privilèges, libertés et immunités de la province[7]. On sait que, depuis Louis XIV, les princes les respectaient peu ; mais l’opposition de la noblesse aux édits du Roi qui y portaient atteinte, n’arrêta pas son dévouement à la royauté pour laquelle elle se fit décimer à l’armée des Princes, à l’armée de Condé, dans la Vendée et à Quiberon, et, depuis lors son histoire n’est qu’un glorieux martyrologe.

Aujourd’hui, la noblesse ne conférant plus de privilèges dans l’État, ayant perdu en France son caractère politique et n’y étant acceptée que comme distinction sociale, n’a plus d’autre place que celle que l’opinion veut bien lui accorder ; mais l’opinion est tenue apparemment en grande estime, puisque l’on voit tant de gens, qui ne sont nés ni nobles ni titrés, poursuivre ces distinctions sociales par des usurpations ridicules ou les convoiter comme de désirables récompenses. Ils ignorent complètement que la vraie noblesse ne se donne ni ne s’achète, qu’elle est indépendante des titres, qu’elle leur est antérieure et supérieure[8].

D’ailleurs, qui est-ce qui se préoccupe de nos jours de la légitimité d’un titre ? Cette indiscrète question ferait sourire dans le monde le plus aristocratique où l’on s’informe seulement si quelqu’un prend un titre, et cette facilité à en prendre comme à en donner, réduit singulièrement la valeur de ceux auxquels les familles ont quelque droit de prétendre.

Nous insérons aux pièces justificatives la liste des terres titrées d’ancienneté immémoriale avec la suite de leurs possesseurs successifs, celle des terres érigées en dignité et celle des titres acquis par lettres souveraines. Nous avons aussi conservé sur nos listes aux personnes qui ont eu les honneurs de la Cour et aux officiers généraux, indépendamment des titres héréditaires dont les uns et les autres pouvaient être décorés, les titres personnels et viagers inscrits sur leurs lettres de présentation ou leurs brevets. En dehors de ces catégories, les seules régulières quoique fort distinctes, il peut exister d’autres titres portés plus ou moins régulièrement par prescription ; il ne nous était pas possible de nous livrer à l’examen de leur légitimité, les éléments de conviction nous faisant absolument défaut ; nous ne pouvions donc les admettre, faute de justification suffisante.

Notre œuvre serait bien imparfaite sans le concours qu’ont bien voulu nous prêter quelques hommes spéciaux auxquels nous sommes heureux de témoigner notre gratitude. C’est à M. Léon de Tréverret, ancien garde-du-corps du Roi, qui possède si parfaitement l’histoire de l’ancienne armée française, que nous devons la nomenclature des pages du Roi et celle des officiers généraux. M. Briant de Laubrière a mis gracieusement à notre disposition les matériaux qu’il avait rassemblés pour une nouvelle édition de son Armorial de Bretagne, et spécialement ses extraits de l’Armoriai Breton, manuscrit de la Bibliothèque de l’Arsenal, et ses extraits des portefeuilles de Gaignières et des Blancs-Manteaux. Enfin, M. Ernest de Cornulier, auteur du Dictionnaire des terres du comté nantais, ouvrage qui nous a été si utile pour cette partie de la Bretagne que nous connaissions moins, a dépouillé à notre intention, aux archives de la Chambre des Comptes de Nantes, plusieurs des documents originaux cités dans notre Bulletin bibliographique. C’est à l’active et précieuse collaboration de M. de Cornulier, c’est à ses lumières et à sa complaisance inépuisables que le public sera redevable de la supériorité de cette édition sur la précédente[9].

Nous aurions désiré y joindre comme complément le Dictionnaire héraldique, aujourd’hui épuisé, publié en 1855 ; mais c’était grossir démésurément notre cadre dont les limites présumées ont été déjà notablement élargies. Nous nous réservons donc de faire ultérieurement de cet ouvrage l’objet d’une publication spéciale, indépendante de celle-ci, dont elle sera néanmoins l’appendice.

Nous n’avons pas sans doute la prétention d’avoir épuisé le sujet dans l’œuvre laborieuse que nous venons d’achever. Il a existé un certain nombre de familles, mentionnées dans les anciennes réformations des fouages, dont les blasons sont encore inconnus, et les procès-verbaux des droits honorifiques et prééminenciers dans les églises décrivent quantité de vitres et d’écussons dont l’attribution reste à fixer. Nous avons du moins beaucoup fait pour remplir les lacunes de l’édition de 1846 et pour faciliter la tâche de nos successeurs, en éclairant bien des doutes et en rectifiant bien des faits.

À défaut d’autre mérite, on ne nous refusera pas, nous l’espérons, celui d’avoir cherché au milieu des ruines que notre époque ajoute à d’autres ruines, à suivre le conseil d’Ovide :

Sparsa… matris collige membra tuæ.

  1. Bulletin du bouquiniste, Paris, Aubry, No du 15 janvier 1862.
  2. Extrait des procès-verbaux des assises des États généraux et ordinaires des pays et duché de Bretagne, convoqués et assemblés par autorité du Roi en la ville de Rennes, l’an 1776.
  3. Voir ci-après notre dissertation sur l’Origine et la formation des noms de famille.
  4. Conférez principalement ; L’Église de Bretagne ou Histoire des Sièges Episcopaux, Collégiales et Abbayes de cette province, publiée d’après les matériaux de D. Morice et continuée par l’abbé Tresvaux. In-8o, Paris, Méquignon junior, 1839.
  5. Déclaration du Conseil des États sur l’interprétation des lettres de 1770. (Journal du Parlement, tome IV.)
  6. « Il est certain qu’en dehors des arrêts rendus par la Chambre de la Réformation de 1668, on n’a jamais eu la même confiance, ni aux ordonnances de maintenue, ni aux jugements émanés soit des Commissaires départis, soit même du Conseil du Roi, où les familles étant moins connues, pouvaient avoir plus de facilité à surprendre des jugements favorables par la similitude des noms, en prenant de fausses attaches à des maisons nobles, ou sur des pièces qui, produites en Bretagne devant les juges instruits des lois et des usages de la province, n’eussent pu soutenir un examen de discussion. »

    (Déclaration du Conseil des États sur l’interprétation des lettres de 1770, imprimée au tome IV du Journal du Parlement.)

    Nous regrettons que la longueur de ce curieux et excellent Mémoire, signé des plus célèbres avocats du temps, MM. Marc de la Chénardaie, Poulain du Parc, Varin, Boylesve et le Chapelier, ne nous permette pas de le reproduire in extenso.

  7. Ce procès-verbal existe aux archives d’Ille-et-Vilaine ; mais l’état nominatif des signataires n’y est pas joint. D’autres mémoires de la noblesse de Bretagne au Roi, imprimés en mai 1788 et janvier 1789, sont au contraire revêtus de 13 à 1400 adhésions par signatures ou par procuration.
  8. Ainsi Rois ou Empereurs ont pu ramasser dans la boue des financiers véreux et des proxénètes et dans le sang des conventionnels régicides pour en faire des princes, des ducs, des comtes ou des barons, tandis que Dieu lui-même, malgré sa toute puissance, ne peut créer spontanément un gentilhomme, puisque cette qualité ne peut s’acquérir que par une longue suite de générations nobles
  9. Nous avons trouvé pour la 3e et présente édition un concours non moins précieux chez M. Frédéric Saulnier, ancien président de la société archéologique d’Ille-et-Vilaine, qui sait tout ce qu’on peut savoir sur les familles de l’évêché de Rennes, et chez M. René Kerviler, auteur de la Bio-Bibliographie bretonne, qui possède à fond tout ce qui regarde les familles du comté nantais.

    Les notes de ces deux érudits auxquels nous offrons l’expression de notre gratitude, ont singulièrement facilité notre tâche.