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CHAPITRE II

LES LIVRES D’IDÉES



Il y a des livres d’idées, comme le Discours de la Méthode, l’Esprit des Lois, le Cours de Philosophie positive. Il y a des livres de sentiments, comme les Confessions et les Mémoires d’Outre-tombe. Il y a des poèmes dramatiques. Il y a des poèmes lyriques. Il est évident que, sauf ce précepte général de lire avec attention et réflexion continuelles, l’art de lire ne peut pas être le même pour ces différents genres d’écrits. Il y a un art de lire pour chacun.

L’art de lire les livres d’idées me semble être celui-ci.

C’est un art de comparaison et de rapprochement continuel. Matériellement on lit un livre d’idées autant en tournant les feuillets de gauche à droite qu’en les tournant de droite à gauche, je veux dire autant en revenant à ce qu’on a lu qu’en continuant de lire. L’homme à idées étant, plus encore qu’un autre, un homme qui ne peut pas tout dire à la fois, se complète et s’éclaire en avançant et on ne le possède que quand on l’a lu tout entier. Il faut donc, à mesure qu’il se complète et qu’il s’éclaire, tenir