Page:Émile Faguet - L'Art de lire.djvu/79

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de l’auteur, est ce qui, plus que tout le reste, vous met comme directement et sans intermédiaire en communication avec son âme.

Ouvrez La Fontaine n’importe où ; aussi bien c’est ce que je viens de faire ; et lisez à demi-voix :

Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé,
Et de tous les côtés au soleil exposé…


sons lourds, sourds, durs, rudes, compacts, sans air ; car il n’y a pas d’e muets ; sensation d’accablement.

Six forts chevaux tiraient un coche,


vers aussi lourd, aussi rude, plus rude même, mais plus court, qui par conséquent serait plus léger s’il n’était pesant par la rudesse des sons et qui, à cause de cela, semble tronqué, semble n’avoir pas pu aller jusqu’à fin de lui-même.

Femmes, moine, vieillards, tout était descendu,

Celui-ci plus léger, du moins moins accablé ; c’est que ceux-ci marchent ou se promènent, ou s’ébrouent et, par comparaison avec le coche, sont presque allègres. Mais l’attelage…

L’attelage suait, soufflait, était rendu,


retour des sonorités sourdes, du vers compact et serré.

Une mouche survient et des chevaux s’approche

Vers léger, rapide, presque dansant ; c’est une étourdie qui entre en scène.