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DE PONTANGES.

— D’honneur !

— Il va en Espagne.

— J’en suis charmé.

— Encore une fois renvoyé pour vous !… Vous devez être bien fier ?

— Non, dit Lionel ; c’est un homme qui a la manie des voyages, qui n’en veut pas convenir… et qui motive son départ pour que dans l’absence on s’occupe de lui…

— J’ai peur que, pour cette fois, son départ ne soit par trop motivé !

En disant cela, madame d’Auray avait une expression de visage très-méchante.

— J’en ignore complètement la cause ; et vous me donnez envie de la savoir.

Alors Lionel sortit de la loge de madame d’Auray et on le vit bientôt entrer dans celle de madame de Pontanges.

Le prince, qui était assis derrière Laurence, se leva et céda sa place à M. de Marny.

Madame de Pontanges et M. de Marny restèrent seuls un moment.

— On ne dirait jamais que vous avez pleuré ce matin, dit Lionel ; vous êtes belle, ce soir, à désespérer… Votre lettre, Laurence, je l’ai là !…

— N’en parlons plus, répondit tristement madame de Pontanges ; il faut l’oublier, Lionel !

— Hélas ! je croyais vous avoir retrouvée… Ce matin vous sembliez encore aimer… Oui, dans vos larmes il y avait encore de l’amour.

— Ce n’était qu’un souvenir.

— Un souvenir n’aurait pas tant de puissance… Ah ! malgré vous, je suis heureux !…

Madame de Pontanges leva sur Lionel un regard sombre : elle fut frappée de l’étrange expression de ses traits… Il y avait quelque chose d’égaré dans ses yeux, de convulsif dans ses lèvres, qui l’effraya.

Elle ne voulut pas l’irriter.

— Il sera bien à plaindre !… pensa-t-elle. Elle s’épouvantait de son désespoir. Puis elle fit cette réflexion : — J’ai