Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 4.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
101
LETTRES PARISIENNES (1837).

héros, c’est le besoin d’un siècle qui se fait homme, c’est la pensée universelle incarnée ; de même un grand poëte est un éclatant symptôme des souffrances d’une époque, c’est sa plainte qu’il exprime, c’est sa blessure qu’il signale ; pardonnez donc à George Sand si la pensée de notre siècle est le désenchantement. Ne lui reprochez point l’amertume de ses chants ; l’aigle que le chasseur vient de blesser n’est pas responsable de ses cris.

Les ouvriers lyonnais occupent encore les élégantes charitables de Paris ; le bazar de Lyon reçoit chaque jour les dons les plus gracieux : d’abord de charmants tableaux, puis des ouvrages en tapisserie d’un travail merveilleux, de jolis vases peints, des écrans, des mouchoirs brodés, des éventails, des boîtes, des nécessaires, des coupes, des albums, des flacons, des jardinières, enfin des superfluités de toute espèce.

C’est ainsi que la commission du bazar désigne les jolis riens qu’on lui envoie. Ainsi, mesdames, cherchez sur vos étagères s’il n’est pas quelque objet qui ne vous plaise plus ; car les plus belles choses n’ont de valeur que par le souvenir. Gardez cette petite tasse fêlée parce qu’elle vous vient d’un ami, et donnez cette coupe magnifique qui vous a été offerte par un ennuyeux. Le prix d’une chose, c’est l’idée qu’on y attache, à moins cependant qu’on ne soit forcé de la payer ; alors cela change, alors c’est le prix qui est l’idée. Vous qui travaillez comme des fées, brodez des fichus, faites des bourses, des tapis, des coussins, des dessous de lampe, des cordons de sonnette, et envoyez tous ces trésors au bazar de Lyon ; les élégants vous diront pendant quinze jours : Que c’est joli, ce que vous faites là ! les belles fleurs, le charmant dessin ! Vous serez adroites et coquettes. Puis, quand tout cela sera vendu, les ouvriers s’écrieront : Quel bonheur ! voilà du pain pour trois jours ! Vous serez bonnes et généreuses, et le plaisir sera double, et la vanité n’y perdra rien.

Dantan vient de faire la caricature de Duprez et celle de Franchomme. On reconnaît à la première vue Duprez et Franchomme, surtout on reconnaît Dantan.

Les innombrables admirateurs de mademoiselle Déjazet se réjouissent, Desbœufs vient de leur offrir son image. La sta-