Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/139

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    Long-temps après que nos amis,
En se disant bonsoir, se furent endormis,
Voici qu’un vieux renard, affamé de victimes,
Arrive au pied de l’arbre ; &, levant le museau,
     Voit l’écureuil sur un rameau.
Il le mange des yeux, humecte de sa langue
Ses lèvres, qui de sang brûlent de s’abreuver.
Mais jusqu’à l’écureuil il ne peut arriver ;
     Il faut donc, par une harangue,
L’engager à descendre ; & voici son discours :
     Ami, pardonnez, je vous prie,
Si de votre sommeil j’ose troubler le cours ;
Mais le pieux transport dont mon âme est remplie
Ne peut se contenir ; je suis votre cousin
                     Germain ;
Votre mère étoit sœur de feu mon digne père.
Cet honnête homme, hélas ! à son heure dernière,
M’a tant recommandé de chercher son neveu,
     Pour lui donner moitié du peu
Qu’il m’a laissé de bien ! Venez donc, mon cher frère,
     Venez, par embrassement,
Combler le doux plaisir que mon âme ressent.
Si je pouvois monter jusqu’aux lieux où vous êtes,
Oh ! j’y serois déjà, soyez-en bien certain.
     Les écureuils ne sont pas bêtes,
     Et le mien étoit fort malin.