Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/164

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Puis la peste viendra, puis nous périrons tous.
— La peste ! dit Guillot : doucement, calmez-vous ;
Je ne vois point cela, compere :
Et s’il faut vous parler selon mon sentiment,
C’est que je vois tout le contraire ;
Car ce nuage, assurément,
Ne porte point de grêle, il porte de la pluie.
La terre est sèche dès long-temps,
Il va bien arroser nos champs ;
Toute notre récolte en doit être embellie.
Nous aurons le double de foin,
Moitié plus de froment, de raisins abondance ;
Nous serons tous dans l’opulence,
Et rien, hors les tonneaux, ne nous fera besoin.
C’est bien voir que cela ! dit Lucas en colere.
Mais chacun a ses yeux, lui répondit Guillot.
— Oh ! puisqu’il est ainsi, je ne dirai plus mot ;
Attendons la fin de l’affaire :
Rira bien qui rira le dernier. — Dieu merci,
Ce n’est pas moi qui pleure ici.
Ils s’échauffoient tous deux ; déjà, dans leur furie,
Ils alloient se gourmer, lorsqu’un souffle de vent
Emporta loin de là le nuage effrayant :
Ils n’eurent ni grêle ni pluie.