Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/51

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Dans les appartements embellis de sculpture,
Sous des lambris de cédre, on voyoit réunis
Et les trésors du luxe & ceux de la nature,
Les fleurs, les diamans, les parfums, la verdure,
Les myrthes odorants, les chefs-d’œuvre de l’art,
Et les fontaines jaillissantes
Roulant leurs ondes bondissantes
A côté des lits de brocart.
Près de ce beau palais, juste devant l’entrée,
Une étroite chaumière, antique & délabrée,
D’un pauvre tisserand étoit l’humble réduit.
Là, content du petit produit
D’un grand travail, sans dette & sans soucis pénibles,
Le bon vieillard, libre, oublié,
Couloit des jours doux & paisibles,
Point envieux, point envié.
J’ai déjà dit que sa retraite
Masquoit le devant du palais.
Le vizir veut d’abord, sans forme de procès,
Qu’on abatte la maisonnette :
Mais le calife veut que d’abord on l’achete.
Il fallut obéir : on va chez l’ouvrier,
On lui porte de l’or. Non, gardez votre somme,
Répond doucement le pauvre homme ;
Je n’ai besoin de rien pour mon attelier ;
Et, quant à ma maison, je ne puis m’en défaire ;