Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/259

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de longues et cruelles guerres. Pourquoi ont-elles été évitées ? Parce que, s’il y a en Europe un parti de la guerre, il y a aussi des amis de la paix ; s’il y a des hommes toujours prêts à guerroyer, qu’une éducation stupide a imbus d’idées antiques et de préjugés barbares, qui attachent l’honneur au seul courage physique et ne voient de gloire que pour les faits militaires, il y a heureusement d’autres hommes à la fois plus religieux, plus moraux, plus prévoyants et meilleurs calculateurs. N’est-il pas bien naturel que ceux-ci cherchent à faire parmi ceux-là des prosélytes ? Combien de fois la civilisation, comme en 1830, en 1840, en 1848, n’a-t-elle pas été, pour ainsi dire, suspendue à cette question : Qui l’emportera du parti de la guerre ou du parti de la paix ? Jusqu’ici le parti de la paix a triomphé, et, il faut le dire, ce n’est peut-être ni par l’ardeur ni par le nombre, mais parce qu’il avait l’influence politique.

Ainsi la paix et la guerre dépendent de l’opinion, et l’opinion est partagée. Donc il y a un danger toujours imminent. Dans ces circonstances, le congrès n’entreprend-il pas une chose utile, sérieuse, efficace, j’oserais même dire facile, quand il s’efforce de recruter pour l’opinion pacifique de manière à lui donner enfin une prépondérance décisive ?

Qu’y a-t-il là de chimérique ? S’agit-il de venir dire aux hommes : « Nous venons vous sommer de fouler aux pieds vos intérêts, d’agir désormais sur le principe du dévouement, du sacrifice, du renoncement à soi-même ? » Oh ! s’il en était ainsi, l’entreprise serait en effet bien hasardée !…

Mais nous venons au contraire leur dire : « Consultez non-seulement vos intérêts de l’autre vie, mais encore ceux de celle-ci. Examinez les effets de la guerre. Voyez s’ils ne vous sont pas funestes ? voyez si les guerres et les gros armements n’amènent pas des interruptions de travail, des crises industrielles, des déperditions de force, des dettes écrasantes, de lourds impôts, des impossibilités financières,