Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/119

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pensé au profit du public. Dès l’instant que le public veut des fontaines, des pavés, des réverbères, il faut qu’il donne de l’argent. On peut imaginer un mode de percevoir cet argent plus convenable que l’octroi, mais on ne peut supprimer l’octroi sans y substituer un autre impôt, ou sans renoncer aux fontaines, aux pavés et aux réverbères. Les deux questions engagées dans l’octroi sont donc celles-ci :

1o Le revenu provenant de l’octroi rend-il au public autant qu’il lui coûte ?

2o Y a-t-il un mode de prélever ce revenu plus économique et plus juste ?

Ces deux questions peuvent et doivent être posées à propos de toutes les contributions existantes et imaginables. Or, sans nier, de beaucoup s’en faut, l’importance de ces questions, l’association du libre-échange ne s’est pas formée pour les résoudre.

L’octroi entrerait immédiatement dans la sphère d’action de l’Association, si, s’écartant de sa fin avouée, il manifestait la prétention de diminuer les échanges pour satisfaire quelques intérêts privilégiés.

Supposons, par exemple, une ville qui aurait mis sur les légumes un droit de 5 p. 100, dont elle tirerait une recette de 20,000 fr. Supposons que le conseil municipal de cette ville vînt à être changé, et que le nouveau conseil se composât de propriétaires, qui, presque tous, auraient de beaux jardins dans l’enceinte des barrières. Supposons enfin que la majorité du conseil, ainsi constitué, prît la délibération suivante :

« Considérant que l’entrée des légumes fait sortir le numéraire de la ville ;

« Que l’horticulture locale est la mère nourricière des citoyens et qu’il faut la protéger ;

« Que, vu la cherté de nos terrains (les pauvres gens !), la pesanteur des taxes municipales et l’élévation des sa-