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LE LIBRE-ÉCHANGE

complétement de nos lois, indépendamment de toute réciprocité et des systèmes qui prévalent ailleurs.

De ce que l’Association poursuit la destruction complète du régime protecteur, il ne s’ensuit pas qu’elle demande qu’une telle réforme s’accomplisse en un jour et sorte d’un seul scrutin. Même pour revenir du mal au bien et d’un état de choses artificiel à une situation naturelle, des précautions peuvent être commandées par la prudence. Ces détails d’exécution appartiennent aux pouvoirs de l’État ; la mission de l’Association est de propager, de populariser le principe.

Quant aux moyens qu’elle entend mettre en œuvre, jamais elle ne les cherchera ailleurs que dans des voies constitutionnelles et légales.

Enfin l’Association se place en dehors de tous les partis politiques[1]. Elle ne se met au service d’aucune industrie, d’aucune classe, d’aucune portion du territoire. Elle em-

  1. L’année suivante, l’auteur commentait ainsi cette phrase :

    « Est-il possible de penser de même sur la liberté commerciale et de différer en politique ? »

    Il nous suffirait de citer des noms d’hommes et de peuples pour prouver que cela est très-possible et très-fréquent.

    Le problème politique, ce nous semble, est celui-ci :

    « Quelles sont les formes de gouvernement qui garantissent le mieux et au moindre sacrifice possible à chaque citoyen sa sûreté, sa liberté et sa propriété ? »

    Certes, on peut ne pas être d’accord sur les formes gouvernementales qui constituent le mieux cette garantie, et être d’accord sur les choses mêmes qu’il s’agit de garantir.

    Voilà pourquoi il y a des conservateurs et des hommes d’opposition parmi les libre-échangistes. Mais, par cela seul qu’ils sont libre-échangistes, ils s’accordent en ceci : que la liberté d’échanger est une des choses qu’il s’agit de garantir.

    Ils ne pensent pas que les gouvernements, n’importe leurs formes, aient mission d’arracher ce droit aux uns pour satisfaire la cupidité des autres, mais de le maintenir à tous.

    Ils sont encore d’accord sur cet autre point qu’en ce moment l’obstacle à la liberté commerciale n’est pas dans les formes du gouvernement, mais dans l’opinion.

    Voilà pourquoi l’Association du libre-échange n’agite pas les questions purement politiques, quoique aucun de ses membres n’entende aliéner