Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/248

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désavoue. Il y a un an, si quelqu’un avait prédit la réforme commerciale, on l’aurait traité de visionnaire. Et moi, je dis : L’Angleterre en a fini avec les guerres de débouchés, non par vertu, mais par intérêt ; et rappelez-vous ces paroles : Pourvu que son honneur soit ménagé, elle renoncera à l’Orégon, dont elle n’aura que faire, qui lui appartiendra toujours par droit de commerce autant et mieux que par droit de conquête. Pour moi, Messieurs, je tiens autant qu’un autre au développement du bien-être matériel de mon pays ; mais si je ne voyais clairement l’intime connexité qui existe entre ces trois choses : liberté commerciale, prospérité, paix universelle, je ne serais pas sorti de ma solitude pour venir prendre à ce grand mouvement la part que votre bienveillance m’a assignée. (V. tome VI, page 507.)

Donc l’Angleterre, les États-Unis, l’Allemagne, l’Italie même, s’avancent vers l’ère nouvelle qui s’ouvre à l’humanité. La France voudra-t-elle se laisser retenir, par quelques intérêts égoïstes, à la queue des nations ? Après s’être laissé ravir le noble privilége de donner l’exemple, dédaignera-t-elle encore de le suivre ? Non, non ; le moment est venu, élevons intrépidement principe contre principe. Il faut savoir, enfin, de quel côté est la vérité. Si nous nous trompons, si l’on nous démontre qu’on enrichit les peuples en les isolant, alors, poussons la protection jusqu’au bout. Renforçons nos barrières internationales, ne laissons rien entrer du dehors, comblons nos ports et nos rivières, et demandons à nos navires, pour dernier service, d’alimenter pendant quelques jours nos foyers ! Que dis-je, et pourquoi n’élèverions-nous pas des barrières entre tous les départements ? Pourquoi ne les affranchirions-nous pas tous des tributs qu’ils se payent les uns aux autres, et pourquoi reculerions-nous devant la protection du travail local sur tous les points du territoire, afin que les hommes, forcés de se suffire à eux-mêmes, soient partout indépendants, et qu’on