Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/275

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producteur, et il est alors aisé d’introduire dans le débat cette conclusion, qui consiste à ne montrer le résultat de la lutte que par un côté, celui du producteur, faisant abstraction du consommateur. Évidemment pour ne rien négliger dans l’appréciation du résultat général, il faut considérer la nation comme un être collectif qui comprend l’intérêt producteur et l’intérêt consommateur ; et alors on s’apercevra que la lutte industrielle l’affecte exactement comme elle affecte ce ménage que j’ai cité pour exemple. C’est, dans l’un et l’autre cas, l’acquisition par voie d’échange, choisie de préférence à l’acquisition par voie de production directe[1].

Mais, Messieurs, je veux, pour un moment, faire aussi abstraction de cette compensation que le consommateur recueille en cas de défaite industrielle, compensation dont les protectionnistes ne tiennent jamais compte. Je veux examiner la lutte industrielle sous le point de vue exclusif des industries qui y sont engagées, et rechercher si c’est la restriction ou la liberté qui leur donne les meilleures chances.

C’est encore une question intéressante ; car quand une grande ville, comme Lyon, par exemple, a fondé, au moins en grande partie, son existence sur une industrie, il est bien naturel qu’elle ne veuille pas la voir succomber par la considération des avantages qu’en pourraient recueillir les consommateurs.

Quel est le champ de bataille de deux industries rivales ? Le bon marché. Comment l’une peut-elle vaincre l’autre ? Par le bon marché. Si, d’une manière permanente, les Suisses peuvent vendre à 80 fr. la même pièce d’étoffe que vous ne pouvez établir qu’à 100 fr., vous serez battus.

Aussi, voyons-nous tous les hommes poursuivre instinctivement un but : la réduction des prix de revient.

  1. V. le chap. Domination par le travail, tome IV, p. 265.(Note de l’éditeur.)