Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/384

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Et quand le maître de forges dit : Pour chaque quintal de fer que je livre au public, j’entends qu’il me paye, en outre du prix, une prime de 20 fr. ;

Que le public se hâte de répondre : Pour chaque quintal de fer que j’introduirai du dehors, en franchise, je prétends que le maître de forges français me paye une prime de 20 fr.

Alors, il serait vrai de dire que les prétentions des deux parties sont également exagérées, et M. le ministre les mettra hors de cause, disant : « Allez, et ne vous infligez pas de taxes les uns aux autres, » — si du moins il est fidèle à sa logique.

Fidèle à sa logique ? Hélas ! cette logique est toute dans l’exposé des motifs ; elle ne reparaît plus dans les actes. Après avoir posé en fait que l’injustice et la justice sont deux exagérations, que ceux qui veulent le maintien des droits protecteurs et ceux qui en demandent la suppression sont également éloignés de la vérité, que devait faire M. le ministre pour être conséquent ? Se placer au milieu, imiter le juge de village qui se prononça pour la demi-bastonnade ; en un mot, réduire les droits protecteurs de moitié. — Il n’y a pas seulement touché. (V. le n° 50.)

Sa dialectique, commentée par ses actes, revient donc à ceci : Pierre, vous demandez à frapper quatre coups ; Jean, vous demandez à n’en recevoir aucun.

La vérité, qui ne se sépare jamais de la modération, est entre ces deux demandes. Selon ma logique, je ne devrais autoriser que deux coups ; selon mon bon plaisir, j’en permets quatre, comme devant. Et, pour l’exécution de ma sentence, je mets la force publique à la disposition de Pierre, aux frais de Jean.

Mais le plus beau de l’histoire, c’est que Pierre sort de l’audience furieux de ce que le juge a osé, en paroles, com-