Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/56

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nufacturiers, aux armateurs, aux actionnaires de mines. Liberté, justice, égalité pour tout le monde.


9. — L’ÉCHELLE MOBILE.


24 Janvier 1847.


Le gouvernement a demandé que le jeu de l’échelle mobile fût suspendu pendant les huit mois qui sont devant nous. Hélas ! que n’a-t-il la puissance de donner à cette mesure un effet rétroactif et de faire que l’échelle mobile ait été suspendue pendant les huit mois qui viennent de s’écouler ! Nous n’en serions pas où nous en sommes ; la crise des subsistances et la crise financière auraient probablement passé inaperçues.

Notre loi céréale séduit beaucoup d’esprits par son air de bonhomie et d’impartialité.

Quoi de plus simple ! Y a-t-il abondance ? La porte d’entrée se ferme d’elle-même et l’agriculteur n’est pas ruiné. — Y a-t-il disette ? La porte s’ouvre naturellement, et le consommateur n’est pas affamé. Ainsi un niveau salutaire est toujours maintenu par une loi si prévoyante, et personne n’a à se plaindre.

Mais, dans l’application, ce nivellement si désiré rencontre des difficultés qu’on n’avait pas prévues et qu’on n’a pas assez étudiées. D’abord, comment se reconnaît l’abondance ou la disette ? par le prix. Et comment signifier à la douane, à chaque instant donné, le prix réel, afin qu’elle sache si elle doit renforcer ou relâcher ses exigences ? Évidemment cela n’est pas possible. Ce n’est donc jamais le prix réel qui sert de règle, mais un prix ancien, fictif, résultat de moyennes fort difficiles à constater, en sorte que l’action de la loi n’a de relations qu’avec un état de choses passé, que l’on suppose fort gratuitement durer encore quand elle opère.