Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/215

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Alors, j’irai droit en avant.

— Fort bien. Mais pour réaliser l’utilité par la justice, il faut une troisième chose.

— Laquelle ?

— La possibilité.

— Vous me l’avez accordée.

— Quand ?

— Tout à l’heure.

— Comment ?

— En me concédant la majorité.

— Il me semblait aussi que la concesion était fort hasardée, car enfin elle implique que la majorité voit clairement ce qui est juste, voit clairement ce qui est utile, et voit clairement qu’ils sont en parfaite harmonie.

— Et si elle voyait clairement tout cela, le bien se ferait, pour ainsi dire, tout seul.

— Voilà où vous m’amenez constamment : à ne voir de réforme possible que par le progrès de la raison générale.

— Comme à voir, par ce progrès, toute réforme infaillible.

— À merveille. Mais ce progrès préalable est lui-même un peu long. Supposons-le accompli. Que feriez-vous ? car je suis pressé de vous voir à l’œuvre, à l’exécution, à la pratique.

— D’abord, je réduirais la taxe des lettres à 10 centimes.

— Je vous avais entendu parler de 5 centimes[1].

— Oui ; mais comme j’ai d’autres réformes en vue, je dois procéder avec prudence pour éviter le déficit.

— Tudieu ! quelle prudence ! Vous voilà déjà en déficit de 30 millions.

— Ensuite, je réduirais l’impôt du sel à 10 fr.

  1. « L’auteur avait dit en effet 5 centimes, en mai 1846, dans un article du Journal des économistes, qui est devenu le chap. xii de la seconde série des Sophismes. (Note de l’éditeur.)