Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/132

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d’impôt sur le capital présenté par M. de Girardin, nous n’avons point hésité à y reconnaître l’une des manifestations les plus hardies de l’idée révolutionnaire ; et bien que l’auteur de ce projet ait été, et soit peut-être encore attaché à la dynastie d’Orléans ; bien que ses tendances personnelles fassent de lui un homme éminemment gouvernemental ; bien qu’enfin il se soit constamment rangé dans le parti de la Conservation contre celui de la Révolution, nous n’en pensons pas moins que son idée appartient au mouvement ; à ce titre, nous l’avons revendiquée comme nôtre ; et si M. de Girardin était capable de renier sa propre pensée, nous la reprendrions en sous-œuvre, et nous nous en ferions un argument de plus contre les adversaires de la Révolution.

C’est d’après cette règle de critique élevée, et pour ainsi dire, impersonnelle, que nous allons répondre à M. Bastiat.

M. Bastiat, au rebours de M. de Girardin, est un écrivain tout pénétré de l’esprit démocratique : si l’on ne peut encore dire de lui qu’il est socialiste, à coup sûr c’est déjà plus qu’un philanthrope. La manière dont il entend et expose l’économie politique le place, ainsi que M. Blanqui, sinon fort au-dessus, du moins fort en avant des autres économistes, fidèles et immuables disciples de J. B. Say. M. Bastiat, en un mot, est dévoué corps et âme à la République, à la liberté, à l’égalité, au progrès : il l’a prouvé mainte fois avec éclat par ses votes à l’Assemblée nationale.

Malgré cela, nous rangeons M. Bastiat parmi les hommes de la résistance : sa théorie du capital et de l’intérêt, diamétralement opposée aux tendances les plus authentiques, aux besoins les plus irrésistibles de la Révolution, nous en fait une loi. Puissent nos lecteurs, à notre exemple, séparer toujours ainsi les questions de personnes d’avec les questions de principes : la discussion et la charité y gagneront.

M. Bastiat commence sa réponse par une observation d’une justesse frappante, que nous croyons d’autant