Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/145

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Non : car — « nous nions, avec le christianisme et l’Évangile, la légitimité en soi du prêt à intérêt. »

Oui : car — « l’usure n’a été, dans son institution providentielle, qu’un instrument d’utilité et de progrès. »

Non : car — « tout ce qui, en remboursement du prêt, est donné en sus du prêt est usure, spoliation. »

Oui et Non, enfin : car — « le socialisme n’a la prétention de convertir personne, ni l’Église, qui nie l’intérêt, ni l’économie politique, qui l’affirme, d’autant moins qu’il est convaincu qu’elles ont raison toutes deux. »

Il y en a qui disent : Ces solutions contradictoires sont un amusement que M. Proudhon donne à son esprit. D’autres : Il ne faut voir là que des coups de pistolet que M. Proudhon tire dans la rue, pour faire mettre le public aux fenêtres. Pour moi, qui sais que vous les appliquez à tous les sujets : liberté, propriété, concurrence, machines, religion, je les tiens pour une conception sincère et sérieuse de votre intelligence.

Mais, Monsieur, pensez-vous que le peuple puisse vous suivre longtemps dans le dédale de vos Antinomies ? Son génie ne s’est pas façonné sur les bancs vermoulus de la Sorbonne. Les fameux : Quidquid dixeris, argumentabor, — Ego verò contrà — ne vont pas à ses franches allures ; il veut voir le fond des choses, et il sent instinctivement qu’au fond des choses il y a un Oui ou un Non, mais qu’il ne peut y avoir un Oui et un Non fondus ensemble. Pour ne pas sortir du sujet qui nous occupe, il vous dira : Il faut pourtant bien que l’intérêt soit légitime ou illégitime, juste ou injuste, providentiel ou satanique, propriété ou spoliation.

La contradiction, soyez-en sûr, est ce qu’il y a de plus difficile à faire accepter, même aux esprits subtils, à plus forte raison au peuple.

Si je m’arrête à la première moitié, j’ose dire à la bonne