Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/315

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guise, et suivant les préoccupations de votre esprit : vous laissez l’idée, le germe, qui seul féconde l’intelligence et dénoue les difficultés.

Je n’avais rien épargné, cependant, pour vous éclairer sur le sens et la portée de ma définition, et vous mettre en garde contre elle. Désespérant de vous la faire concevoir par la seule métaphysique du langage, je l’avais réduite en équations, pour ainsi dire, algébriques. Car, qu’est-ce que la science du comptable, dont j’ai fait usage à cette occasion, sinon une sorte d’algèbre ? Mais voici bien une autre affaire. Vous raisonnez de la tenue des livres absolument comme de la valeur faite : il vous était réservé, après avoir accepté une définition sans en comprendre les termes, sans en apercevoir les conséquences, d’en nier encore la démonstration. Mais, Monsieur, la démonstration, c’est la définition : où donc en êtes-vous ?

Je lis dans votre lettre du 3 février :

« Ayant imaginé ces données, vous dressez la comptabilité de A, de B, et celle de la Banque. Certes cette comptabilité, les données étant admises, est irréprochable. Mais peut-on admettre vos données ? sont-elles conformes à la nature des hommes et des choses ? »

Ceci, j’ose vous le dire, est le renversement de l’arithmétique et du sens commun. Mais, Monsieur, si vous aviez eu la plus légère teinture de comptabilité, vous n’eussiez pas écrit de pareilles lignes. Vous auriez su que si, comme vous êtes forcé de l’avouer, ma comptabilité est irréprochable, les données économiques sur lesquelles je l’ai établie sont, dans le premier système, qui est le vôtre, nécessairement fausses ; dans le second, qui est le mien, nécessairement vraies. Telle est l’essence de la comptabilité, qu’elle ne dépend pas de la certitude de ses données ; elle ne souffre pas de données fausses ; elle est, par elle-même, et malgré la volonté du comptable, la démonstration de la vérité ou de