Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

billets de banque, etc. Grâce à ces merveilleux mécanismes, éclos de la civilisation, la perfectionnant et se perfectionnant eux-même avec elle, un effort exécuté aujourd’hui à Paris ira satisfaire un inconnu, par delà les océans et par delà les siècles ; et celui qui s’y livre n’en reçoit pas moins sa récompense actuelle, par l’intermédiaire de personnes qui font l’avance de cette rémunération et se soumettent à en aller demander la compensation à des pays lointains ou à l’attendre d’un avenir reculé. Complication étonnante autant que merveilleuse, qui, soumise à une exacte analyse, nous montre, en définitive, l’intégrité du phénomène économique, besoin, effort, satisfaction, s’accomplissant dans chaque individualité selon la loi de justice.

Bornes de l’Échange. Le caractère général de l’Échange est de diminuer le rapport de l’effort à la satisfaction. Entre nos besoins et nos satisfactions, s’interposent des obstacles que nous parvenons à amoindrir par l’union des forces ou par la séparation des occupations, c’est à dire par l’Échange. Mais l’Échange lui-même rencontre des obstacles, exige des efforts. La preuve en est dans l’immense masse de travail humain qu’il met en mouvement. Les métaux précieux, les routes, les canaux, les chemins de fer, les voitures, les navires, toutes ces choses absorbent une part considérable de l’activité humaine. Voyez, d’ailleurs, que d’hommes uniquement occupés à faciliter des échanges, que de banquiers, négociants, marchands, courtiers, voituriers, marins ! Ce vaste et coûteux appareil prouve mieux que tous les raisonnements ce qu’il y a de puissance dans la faculté d’échanger ; sans cela comment l’humanité aurait-elle consenti à se l’imposer ?

Puisqu’il est dans la nature de l’Échange d’épargner des efforts et d’en exiger, il est aisé de comprendre quelles sont ses bornes naturelles. En vertu de cette force qui pousse l’homme à choisir toujours le moindre de deux maux,