Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/501

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moins profitable que l’action isolée, celui-ci serait maître de se réfugier dans l’isolement, asile toujours ouvert (excepté sous l’esclavage) contre l’association volontaire et onéreuse ; car le travail peut toujours dire au capital : Aux conditions que tu m’offres, je préfère agir seul.

On objecte que ce refuge est illusoire et dérisoire, que l’action isolée est interdite au travail par une impossibilité radicale, et qu’il ne peut se passer d’instruments sous peine de mort.

Cela est vrai, mais confirme la vérité de mon assertion, à savoir : que le capital, parvînt-il à porter ses exigences jusqu’aux extrêmes limites, fait encore du bien au travail, par cela seul qu’il se l’associe. Le travail ne commence à entrer dans une condition pire que la pire association qu’au moment où l’association cesse, c’est-à-dire quand le capital se retire. Cessez donc, apôtres de malheur, de crier à la tyrannie du capital, puisque vous convenez que son action est toujours, — plus ou moins sans doute, mais toujours bienfaisante. Singulier tyran, dont la puissance est secourable à tous ceux qui en veulent ressentir l’effet, et n’est nuisible que par abstention  !

Mais on insiste sur l’objection en disant : Cela pouvait être ainsi dans l’origine des sociétés. Aujourd’hui le capital a tout envahi ; il occupe tous les postes ; il s’est emparé de toutes les terres. Le prolétaire n’a plus ni air, ni espace, ni sol où mettre ses pieds, ni pierre où poser sa tête, sans la permission du capital. Il en subit donc la loi, vous ne lui donnez pour refuge que l’isolement, qui, vous en convenez, est la mort  !

Il y a là une ignorance complète de l’économie sociale et une déplorable confusion.

Si, comme on le dit, le capital s’est emparé de toutes les forces de la nature, de toutes les terres, de tout l’espace, je demande au profit de qui. À son profit sans doute. Mais