Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/611

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hommes. — Puisqu’il a reconnu les vices de l’œuvre divine et entrepris de la refaire, il n’est pas homme ; il est Dieu et plus que Dieu…

Le Socialisme a deux éléments : le délire de l’inconséquence et le délire de l’orgueil !

Mais dès que le libre arbitre, qui est le point de départ de toutes nos études, rencontre une négation, ne serait-ce pas ici le lieu de le démontrer ? Je m’en garderai bien. Chacun le sent, cela suffit. Je le sens, non pas vaguement, mais plus intimement cent fois que s’il m’était démontré par Aristote ou par Euclide. Je le sens à la joie de ma conscience quand j’ai fait un choix qui m’honore ; à ses remords, quand j’ai fait un choix qui m’avilit. En outre, je suis témoin que tous les hommes affirment le libre arbitre par leur conduite, encore que quelques-uns le nient dans leurs écrits. Tous comparent les motifs, délibèrent, se décident, se rétractent, cherchent à prévoir ; tous donnent des conseils, s’irritent contre l’injustice, admirent les actes de dévouement. Donc tous reconnaissent en eux-mêmes et dans autrui le libre arbitre, sans lequel il n’y a ni choix, ni conseils, ni prévoyance, ni moralité, ni vertu possibles. Gardons-nous de chercher à démontrer ce qui est admis par la pratique universelle. Il n’y a pas plus de fatalistes absolus même à Constantinople, qu’il n’y avait de sceptiques absolus même à Alexandrie. Ceux qui se disent tels peuvent être assez fous pour essayer de persuader les autres, — ils ne sont pas assez forts pour se convaincre eux-mêmes. Ils prouvent très-subtilement qu’ils n’ont pas de volonté ; — mais comme, ils agissent comme s’ils en avaient une, ne disputons pas avec eux.




Nous voici donc placés au sein de la nature, au milieu de nos frères ; — pressés par des impulsions, des besoins, des appétits, des désirs, — pourvus de facultés diverses pour