Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des services réciproques, il est très-exact de dire que nous sommes tous, y compris les agriculteurs et les fabricants, des intermédiaires à l’égard les uns des autres.

Voilà ce que j’avais à dire, pour le moment, sur le concours de la nature. Elle met à notre disposition, dans une mesure fort diverse selon les climats, les saisons et l’avancement de nos connaissances, mais toujours gratuitement, des matériaux et des forces. Donc ces matériaux et ces forces n’ont pas de valeur : il serait bien étrange qu’ils en eussent. D’après quelle règle l’estimerions-nous ? Comment comprendre que la nature se fasse payer, rétribuer, rémunérer ? Nous verrons plus tard que l’échange est nécessaire pour déterminer la valeur. Nous n’achetons pas les biens naturels, nous les recueillons, et si, pour les recueillir, il faut faire un effort quelconque, c’est dans cet effort, non dans le don de la nature, qu’est le principe de la valeur.

Passons à l’action de l’homme, désigné d’une manière générale sous le nom de travail.

Le mot travail, comme presque tous ceux qu’emploie l’économie politique, est fort vague ; chaque auteur lui donne un sens plus ou moins étendu. L’économie politique n’a pas eu, comme la plupart des sciences, la chimie par exemple, l’avantage de faire son vocabulaire. Traitant de choses qui occupent les hommes depuis le commencement du monde et font le sujet habituel de leurs conversations, elle a trouvé des expressions toutes faites, et est forcée de s’en servir.

On restreint souvent le sens du mot travail à l’action presque exclusivement musculaire de l’homme sur les choses. C’est ainsi qu’on appelle classes travailleuses celles qui exécutent la partie mécanique de la production.

Le lecteur comprendra que je donne à ce mot un sens plus étendu. J’entends par travail l’application de nos facultés à la satisfaction de nos besoins. Besoin, effort, satis-