Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, X.djvu/252

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Tout à coup, là-bas, derrière les arbres des fermes, la cloche de l’église tinta. Sa voix de fer jetait dans le ciel joyeux son appel faible et lointain. Des hirondelles filaient comme des flèches à travers l’espace bleu qu’enfermaient les grands hêtres immobiles. Une odeur d’étable passait parfois, mêlée au souffle doux et sucré des pommiers.

Un des hommes debout devant la porte se tourna vers la maison et cria :

— Allons, allons, Mélina, v’là que ça sonne !

Il avait peut-être trente ans. C’était un grand paysan, que les longs travaux des champs n’avaient point encore courbé ni déformé. Un vieux, son père, noueux comme un tronc de chêne, avec des poignets bossués et des jambes torses, déclara :

— Les femmes, c’est jamais prêt, d’abord.

Les deux autres fils du vieux se mirent à rire, et l’un, se tournant vers le frère aîné, qui avait appelé le premier, lui dit :

— Va les quérir, Polyte. All’ viendront point avant midi.

Et le jeune homme entra dans sa demeure.

Une bande de canards arrêtée près des paysans se mit à crier en battant des ailes ; puis ils partirent vers la mare de leur pas lent et balancé.