Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, I.djvu/452

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Ursini sont écrits au-dessus des boutiques, il y a des Archinto apothicaires ; mais croyez que, malgré ma condition de boutiquière, j’ai les sentiments d’une duchesse.

— Un reproche ? non, madame, j’ai voulu vous faire un éloge…

— Par une comparaison ?… dit-elle avec finesse.

— Ah ! sachez-le, reprit-il, afin de ne plus me tourmenter si mes paroles peignaient mal mes sentiments, mon amour est absolu, il comporte une obéissance et un respect infinis.

Elle inclina la tête en femme satisfaite et dit : — Monsieur accepte alors le traité ?

— Oui, dit-il. Je comprends que, dans une puissante et riche organisation de femme, la faculté d’aimer ne saurait se perdre, et que, par délicatesse, vous vouliez la restreindre. Ah ! Francesca, une tendresse partagée, à mon âge et avec une femme aussi sublime, aussi royalement belle que vous l’êtes, mais c’est voir tous mes désirs comblés. Vous aimer comme vous voulez être aimée, n’est ce pas pour un jeune homme se préserver de toutes les folies mauvaises ? n’est-ce pas employer ses forces dans une noble passion de laquelle on peut être fier plus tard, et qui ne donne que de beaux souvenirs ?… Si vous saviez de quelles couleurs, de quelle poésie vous venez de revêtir la chaîne du Pilate, le Rhigi, et ce magnifique bassin…

— Je veux le savoir, dit-elle.

— Hé ! bien, cette heure rayonnera sur toute ma vie, comme un diamant au front d’une reine.

Pour toute réponse, Francesca posa sa main sur celle de Rodolphe.

— Oh ! chère, à jamais chère, dites, vous n’avez jamais aimé ?

— Jamais !

— Et vous me permettez de vous aimer noblement, en attendant tout du ciel ?

Elle inclina doucement la tête. Deux grosses larmes roulèrent sur les joues de Rodolphe.

— Hé ! bien, qu’avez-vous ? dit-elle en quittant son rôle d’impératrice.

— Je n’ai plus ma mère pour lui dire combien je suis heureux, elle a quitté cette terre sans voir ce qui eût adouci son agonie…

— Quoi ? fit-elle.

— Sa tendresse remplacée par une tendresse égale.

Povero mio, s’écria l’Italienne attendrie. C’est, croyez-