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Séance du 10 avril 1793

ont l’art de paraître quelquefois divisés pour cacher leur criminelle intelligence. Au surplus, que Dumouriez ait eu part ou non à ce retard funeste qu’a éprouvé l’expédition de la Hollande, il doit du moins être imputé à la malveillance de la majorité du conseil exécutif et des coriphées de la faction qui dominait dans les comités diplomatique et de défense générale. Les députés bataves se sont plaints eux-mêmes hautement dans un mémoire qu’ils ont rendu public, et qui est entre nos mains, de l’opiniâtreté avec laquelle leurs offres et leurs instances ont été repoussées depuis trois mois par le ministre des affaires étrangères. On ne peut nier au moins que Dumouriez et les chefs de la faction ne fussent parfaitement d’accord sur le projet de ravir la Belgique à la France. On connaît les efforts de Dumouriez pour empêcher l’exécution des décrets des 15 et des 25 décembre[1]. On connaît toutes ses perfidies. D’un autre côté, on sait comment le comité diplomatique a repoussé tous les peuples qui voulaient s’incorporer à nous. Rolland disait des députés de la Savoie : « On doit m’envoyer des Savoisiens, pour solliciter la réunion de ce pays ; je les recevrai à cheval. » [2] Comment est-il possible que vous vouliez vous réunir à notre anarchie, disait Brissot, aux Belges et aux Liégeois[3] ; tel était le langage des Guadets, des Gensonné. Ils sont venus à bout de retarder toutes ces réunions jusqu’au moment où le parti ennemi de

  1. Décret du 15 déc. 1792 sur la nouvelle organsation de 1a Belgique, voté sur la proposition de Cambon. (A. Ghuquet : Jemmapes et la conquête de la Belgique, p. 193). Mais ce décret, tout en donnant au gouvernement belge une forme démocratique et libérale, imposait la présenee de commissaires de la Convention pour le surveiller et régler la conduite des généraux qui occuperaient encore le pays. Plusieurs régions de la Belgique protestèrent contre ces dispositions. Les Comités diplomatique, de Législation et de la Guerre chargèrent Cambon de présenter un nouveau rapport et de rédiger un projet de décret complétant les pouvoirs des commissaires. Ce décret fut rendu le 27 déc, et non le 25, comme le dit Robespierre (Audard, Recueil des Actes…, I, 364).
  2. Dès octobre 1792, la Savoie, libérée du joug du roi de Sardaigne, avait demandé sa réunion à la France. D’abord mal reçus par le ministre Roland, ses délégués s’étaient adressés le 21 nov., à la Convention, laquelle, sur le rapport de Grégoire, du 27, avait décidé cette réunion et que la Savoie formerait un 84e département sous le nom de département du Mont-Blanc, et avait envoyé quatre représentants en mission pour l’organiser (Aulard, Recueil des Actes, I, 270).
  3. Brissot, membre des Comités diplomatique et de defense générale, s’était toujours montré opposé à la réuriion de la Belgique à la France. C’est au sein de ces Comités qu’il aurait tenu les propos que lui prête Robespierre, lors de la discussion soulevée par Grégoire sur la protection à accorder aux peuples qui réclameraient leur réunion à la France (21 nov. 1792).