Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/266

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EUTHYPHRON

Certainement.

SOCRATE

VIII. — Allons maintenant, soumettons à l’examen ce que nous disons. Une chose et un homme chers aux dieux sont pieux ; une chose et un homme haïs des dieux sont impies, et la piété et l’impiété ne sont pas la même chose, mais elles sont tout à fait opposées l’une à l’autre, n’est-ce pas ?

EUTHYPHRON

Assurément.

SOCRATE

Et cela paraît bien dit.

EUTHYPHRON

Je le crois, Socrate ; c’est en effet bien dit.

SOCRATE

Mais n’a-t-il pas été dit aussi, Euthyphron, que les dieux se divisent et sont en désaccord les uns avec les autres et qu’il y a parmi eux des haines mutuelles?

EUTHYPHRON

Ç’a été dit en effet.

SOCRATE

Mais ces haïnes et ces colères, sur quoi roulent les différends qui les produisent ? Examinons la question de cette manière. Si nous disputions, toi et moi, à propos de nombre, sur la plus grande de deux quantités, ce différend nous rendrait-il ennemis et nous fâcherions-nous l’un contre l’autre, ou bien, nous mettant à compter, ne serions-nous pas vite d'accord sur un tel sujet?

EUTHYPHRON

Certainement.

SOCRATE

Et si nous disputions sur le plus ou le moins de grandeur d’un objet, ne mettrions-nous pas vite un terme à notre différend en recourant à la mesure ?

EUTHYPHRON

C'est vrai.