Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/446

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t juste, force lui est de l’accepter ; s’il ne l’accepte pas, il se couvrira de ridicule.

SOCRATE

XII. — Il est certain, excellent Hippias, que loin d’accepter ta réponse, il se moquera même de moi et me dira : « Es-tu fou ? prends-tu Phidias pour un mauvais sculpteur ? » Et moi je lui répondrai sans doute : « Non, pas du tout. »

HIPPIAS

Et tu auras bien répondu, Socrate.

SOCRATE

Oui, certainement. Dès lors, quand je serai convenu que Phidias était un excellent artiste, il poursuivra : « Et tu crois que ce beau dont tu parles, Phidias l’ignorait ? — Pourquoi cette demande ? dirai-je. — C’est, dira-t-il, qu’il n’a fait en or ni les yeux de son Athéna, ni le reste de son visage, ni ses pieds, ni ses mains, s’il est vrai qu’étant d’or la statue devait paraître plus belle, mais qu’il les a faits en ivoire. Il est évident qu’en cela il a péché par ignorance, faute de savoir que c’est l’or qui rend beaux tous les objets auxquels on l’applique. » Quand il dira cela, que faut-il répondre, Hippias ?

HIPPIAS

Il n’y a là rien de difficile. Nous lui dirons que Phidias a bien fait ; car l’ivoire aussi, je pense, est une belle chose.

SOCRATE

« Alors, pourquoi, dira-t-il, au lieu de faire le milieu des yeux en ivoire, l’a-t-il fait d’une pierre précieuse, après en avoir trouvé une qui fût aussi semblable que possible à l’ivoire ? Serait-ce qu’une pierre est aussi une belle chose ? » Le dirons-nous, Hippias ?

HIPPIAS

Oui, nous le dirons, à condition qu’elle convienne.

SOCRATE

Et lorsqu’elle ne convient pas, elle est laide ? L’avouerai-je, oui ou non ?