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GUERRE DE JUGURTHA.

La mer y est orageuse, les côtes offrent peu de ports, le sol y est fertile en grains, abondant en pâturages, dépouillé d’arbres : les pluies et les sources y sont rares. Les hommes y sont robustes, légers à la course, durs au travail : à l’exception de ceux que moissonne le fer ou la dent des bêtes féroces, la plupart meurent de vieillesse, car rien n’y est plus rare que d’être emporté par la maladie. En revanche, il s’y trouve quantité d’animaux, d’espèce malfaisante. Pour ce qui est des premiers habitants de l’Afrique, de ceux qui sont venus ensuite, et du mélange de toutes ces races, je vais, au risque de contrarier les idées reçues, rapporter en peu de mots les traditions que je me suis fait expliquer d’après les livres puniques, qui venaient, dit-on, du roi Hiempsal ; elles sont conformes à la croyance des habitants du pays. Au surplus, je laisse aux auteurs de ces livres la garantie des faits.

XVIII. Les premiers habitants de l’Afrique furent les Gétules et les Libyens, nations farouches et grossières, qui se nourrissaient de la chair des animaux sauvages et broutaient l’herbe comme des troupeaux. Ils ne connaissaient ni le frein des mœurs et des lois, ni l’autorité d’un maître. Sans demeures fixes, errant à l’aventure, leur seul gîte était là où la nuit venait les surprendre. À la mort d’Hercule, qui périt en Espagne, selon l’opinion répandue en Afrique, son armée, composée d’hommes de toutes les nations, se trouva sans chef, tandis que vingt rivaux s’en disputaient le commandement : aussi ne tarda-t-elle pas à se disperser. Dans le nombre, les Mèdes, les Perses et les Arméniens passèrent en Afrique sur leurs navi-