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HUITIÈME PROVINCIALE 147

ces outrages, doit reparer du sien le mal qui en sera issu. Mon sentiment est que non. Car à restitution nul n’est tenu, s’il n’a violé la justice. La viole-t’on quand on prie autruy d’une faveur ? Quelque demande qu’on luy en fasse, il demeure toujours libre de l’octroyer ou de la nier. De quelque costé qu’il encline, c’est sa volonté qui l’y porte ; rien ne l’y oblige que la bonté, que la douceur, et la facilité de son esprit. Si donc ce soldat ne repare le mal qu’il aura fait, il n’y faudra astreindre celuy à la prière duquel il aura offensé l’innocent. Ce passage pensa rompre nostre entretien, car je fus sur le point d’eclater de rire de la 1 bonté et douceur d’un bruleur de grange 2, et de ces estranges raisonnemens, qui exemptent de restitution le premier et veritable auteur d’un incendie, que les juges n’exempteroient pas de la 3 corde ; mais si je ne me fusse retenu le bon Pere s’en fut offensé ; car il parloit serieusement, et me dit ensuite du mesme air : Vous devriez reconnoistre par tant d’espreuves, combien vos objections sont vaines ; cependant vous nous faites sortir par là de nostre sujet. Revenons donc aux personnes incommodées, pour le soulagement desquelles nos Peres, comme entre autres Lessius I. 2. c. 12. 4 [d]. 12. assurent qu’il est permis de déro-

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1. P. bonté et, manque; P’. bonté et douceur [d’esprit] d’un....

2. Cf. cette note de Pascal (Pensées, fr. 926, T. III, p. 361) : « Opposer non des maximes saintes, mais des abominables. — Ils raisonnent comme ceux qui montrent qu’il est nuit à midy. Bauny ; bruleur de granges. »

3. B. [mort].

4. Toutes les éditions, par erreur [n.] 12. — Cf. le texte de Leys, supra p. 127, et celui d’Escobar, supra p. 123.