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INTRODUCTION


I. — ORDONNANCE DU LIEUTENANT-CIVIL


Depuis quelque temps déjà on parlait secrètement d'une intervention violente de l'autorité : des mesures sévères devaient arrêter la publication des Provinciales ; les religieuses allaient être persécutées de nouveau. Pascal faisait allusion à ces rumeurs dans ses dernières Lettres. Le 10 décembre, le gazetier Loret annonçait la nouvelle (cf. Hermant, Mémoires, T. III, p. 223, note) ; le 12, Gui Patin parlait d'un arrêt du Conseil d'en haut défendant d'écrire contre les Jésuites. Le 23 enfin, on affichait et trompetait dans les rues une ordonnance du Châtelet défendant d'imprimer sans privilège et sans nom d'auteur.

Cette mesure ne pouvait pas avoir le succès espéré ; l'agitation était trop grande de toutes parts. Nous en avons une preuve dans les curieuses lettres de Gui Patin à Spon.

« 5 decembre 1656.... Je vous supplie de dire à M. Gras que je suis son trés-humble Serviteur, et que j'ay céans les quatorze Lettres des Jansenistes pour luy, dans un paquet, et autant pour vous dans un autre, que j'augmente tous deux à mesure qu'il en vient de nouvelles, dont on nous donne grande esperance tous les jours. Un honneste homme du bon parti, m'a dit ce matin, que dans huit jours nous aurons la quinzieme, sans perdre l'esperance de celles qui viendront, et nati natorum, et qui nascentur ab illis. Toutes ces nouvelles lettres sont de telle efficace chez les honnestes gens, que les pauvres Jesuites ne sçavent plus où ils en sont. On ne peut repondre à ces lettres, quæ jugulum petunt, elles font telle impression dans l'esprit des gens raisonnables, que si ces

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