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gage de vostre escole. Et c’est une chose étonnante que vous ayez le front de le parler si haut, puis qu’il marque vostre sentiment si à découvert, et vous convainc de tenir pour seüre en conscience cette opinion, qu’on peut tuer pour un soufflet, aussi-tost que vous nous avez dit que plusieurs Auteurs celebres la soûtiennent.

Vous ne pouvez vous en deffendre, mes Peres, non plus que vous prevaloir des passages de Vasquez et de Suarez que vous m’opposez, où ils condamnent ces meurtres que leurs Confreres approuvent. Ces témoignages separez du reste de vostre doctrine pourroient ébloüir ceux qui ne l’entendent pas assez. Mais il faut joindre ensemble vos principes et vos maximes. Vous dites donc icy que Vasquez ne souffre point les meurtres ; mais que dites-vous d’un autre costé, mes Peres? Que la probabilité d’un sentiment, n’empesche pas la probabilité du sentiment contraire. Et en un autre lieu, Qu’il est permis de suivre l’opinion la moins probable et la moins seüre, en quitant l’opinion la plus probable et la plus seüre. Que s’ensuit-il de tout cela ensemble, sinon que nous avons une entiere liberté de conscience pour suivre celuy qui nous plaira de tous ces avis opposez ? Que devient donc, mes Peres, le fruit que vous esperiez de toutes ces citations? Il disparoist, puisqu’il ne faut pour vostre condamnation que r’assembler ces maximes, que vous separez pour vostre justification. Pourquoy produisez-vous donc ces passages de vos Auteurs que je n’ay point citez, pour excuser ceux que j’ay citez ;