Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ceux qui sont sauvez ou damnez ; Et il n’y a point de question en toutes ces choses.

Si donc on demande pourquoy les hommes sont sauvez ou damnez, on peut en un sens dire que c’est parce que Dieu le veut et en un sens dire que c’est parce que les hommes le veulent.

Mais il est question de sçavoir laquelle de ces deux volontez, sçavoir de la volonté de Dieu ou de la volonté de l’homme est la maistresse, la dominante, la source, le principe et la cause de l’autre.

Il est question de sçavoir si la volonté de l’homme est la cause de la volonté de Dieu, ou[1][si] la volonté de Dieu est la cause de la volonté de l’homme. Et celle qui sera dominante et maistresse de l’autre sera considérée comme unique en quelque sorte, non[2]parce qu’elle le soit, mais parce qu’elle enferme le concours de la volonté suivante. Et l’action sera rapportée à cette volonté première et non à l’autre. Ce n’est pas qu’elle ne puisse estre aussi en un sens rapportée à la volonté suivante : mais elle l’est proprement à la volonté maistresse, comme à son principe. Car la volonté suivante est telle qu’on peut dire en un sens que l’action provient d’elle, puisqu’elle y concourt, et en unsens qu’elle n’en provient pas, parce qu’elle n’en est pas l’origine ; mais la volonté primitive est telle qu’on peut bien dire d’elle que l’action en provient, mais on ne peut en aucune sorte dire d’elle que l’action n’en provient pas.

  1. Leçon donnée par Clémencet.
  2. Clémencet propose de corriger : non pas qu’elle le soit.