Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/165

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dans tout le monde, tantost tous, parce qu’ils font une totalité, tantost plusieurs, parce qu’ils sont plusieurs entr’eux, tantost peu, parce qu’ils sont peu à proportion de la totalité des délaissés.

Que les délaissés font une totalité qui est appelée monde, tous et plusieurs ; et jamais, peu.

Que Dieu, par une volonté absoluë et irrévocable, a voulu sauver ses Elûs, par une bonté purement gratuite, et qu’il a abandonné les autres à leurs mauvais désirs où il pouvoit avec justice abandonner tous les hommes.

Pour sauver ses Elûs, Dieu a envoyé Jesus-Christ pour satisfaire à sa justice, et pour meriter de sa misericorde la grace de Rédemption, la grace médicinale, la grace de Jesus-Christ, qui n’est autre chose qu’une suavité et une délectation dans la Loy de Dieu, repanduë dans le cœur par le Saint-Esprit, qui non seulement egalant, mais surpassant encore la concupiscence de la chair, remplit la volonté d’une plus grande délectation dans le bien, que la concupiscence ne luy en offre dans le mal, et qu’ainsi le libre arbitre, charmé par les douceurs et par les plaisirs que le Saint-Esprit luy inspire, plus que par les attraits du péché, choisit infailliblement luy-mesme la loy de Dieu par cette seule raison qu’il y trouve plus de satisfaction et qu’il y sent sa béatitude et sa félicité.

De sorte que ceux à qui il plaist à Dieu de donner cette grâce, se portent d’eux-mesmes par leur libre arbitre à préférer infailliblement Dieu à la Créature.