Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/140

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allait éclater avec l’indifférence d’un écueil, les deux mains dans ses poches, le dos appuyé contre le manteau de la cheminée, et chantonnant entre ses lèvres :

Malbrough s’en va-t-en guerre, Mironton, mironton, mirontaine, Malbrough s’en va-t-en guerre, Savoir s’il reviendra.

Ma grand’mère eut à peine éconduit le sergent, qu’impatiente d’en venir aux mains, elle vint se placer en face de Benjamin.

— Eh bien ! Benjamin, es-tu content de ta journée ? te trouves-tu bien comme cela ? faut-il que j’aille tirer une bouteille de vin blanc ?

— Merci, chère sœur. Comme vous le dites très élégamment, ma journée est finie.

— Belle journée, en effet ; il en faudrait beaucoup comme celle-là pour payer tes dettes. Te reste-t-il au moins assez de raison pour me dire comment vous a reçus M. Minxit ?

— Mironton, mironton, mirontaine, chère sœur, fit Benjamin.

— Ah ! mironton, mironton, mirontaine, s’écria ma grand’mère, attends ! je vais t’en donner, moi, du mironton, mirontaine, – et elle s’empara des pincettes.

Mon oncle recula de trois pas et tira son épée.

— Chère sœur, dit-il, se mettant en garde, je vous rends responsable de tout le sang qui va être répandu ici.

Mais ma grand’mère, quoiqu’elle descendît d’un robin, n’avait pas peur d’une épée ; elle porta à son frère un coup de pincettes qui l’atteignit au pouce et lui fit lâcher sa lame.

Benjamin tournait autour de la chambre, serrant son pouce blessé de sa main gauche. Pour mon grand-père, quoiqu’il fût bon entre les meilleurs, il