Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/172

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dance homérique, il y a ici toute une basse-cour ; cela suffirait à rassasier une compagnie de dragons après la grande manœuvre. Est-ce que par hasard vous attendez notre ami Arthus ?

— J’aurais fait mettre une broche de plus, répondit en riant M. Minxit. Mais si nous ne pouvons venir à bout de tout cela, il se trouvera bien des gens qui achèveront notre besogne ; et mes officiers, c’est-à-dire ma musique, et les clients qui viendront demain m’apporter leurs fioles, est-ce qu’il ne faut pas que je songe à eux ? J’ai pour principe, moi, que celui qui ne fait préparer à dîner que pour lui, n’est pas digne de dîner.

— C’est juste, répliqua mon oncle. Et après cette réflexion philosophique, il se mit à attaquer les poulets de M. Minxit comme s’il eût eu contre eux une inimitié personnelle.

Les convives se convenaient ; du reste, mon oncle convenait à tout le monde, et tout le monde lui convenait. Ils jouissaient très franchement et bruyamment de l’hospitalité plantureuse de M. Minxit. « Fifre, dit celui-ci à un des valets qui servait la table, fais apporter du bourgogne et va dire à la musique qu’elle se rende ici avec armes et bagages ; il n’y a point d’exemption pour les hommes ivres. » La musique arriva bientôt et se rangea autour de la salle. M. Minxit ayant décoiffé quelques bouteilles de bourgogne, leva solennellement son verre plein. « Messieurs, dit-il, à la santé de M. Benjamin Rathery, le premier médecin du bailliage ; je vous le présente comme mon gendre, et vous prie de l’aimer comme vous m’aimez. – Allez musique ! ». Alors un bruit infernal de grosse caisse, de triangle, de cymbales et de clarinette éclata dans la salle, et mon oncle se trouva obligé de demander grâce pour les convives. Cette