Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/38

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pondrais : Majesté, la voilà ma voix, et si j’en avais trente, elles seraient à votre service ! seulement je vous prie de ne pas me faire ressembler à Napoléon, et de ne pas me mettre votre nom en lettres d’or sur le côté. »

Où apprendrons-nous mieux encore sa ferveur, sa chaleur d’ame pour le pauvre peuple, que dans ce passage si foncièrement démocratique, sur les dotations de princes :

« Mais la majorité de la nation, savez-vous de quels hommes elle se compose ? Vous, gens du domaine privé et de la liste civile, qui vous faites si pauvres, êtes-vous, comme le bûcheron, du matin au soir, dans l’herbe gelée de la forêt, à abattre des ormes et des chênes secouant leur neige et leur grésil sur votre tête ?

« Allez-vous, comme le vigneron, fouiller avec une lourde pioche, le gravier ingrat de nos coteaux, et recevez-vous pour le salaire de toute votre journée 1 fr. 25 cent, et un litre de piquette ?

« Vous plongez-vous, comme le flotteur, jusqu’à la ceinture, dans l’eau glacée, pour amener sur le rivage ces longues traînées de bûches qui nagent au courant du fleuve ?

« Comme le batteur en grange, battez-vous jusqu’au soir la terre avec un lourd fléau dont le bruit matinal a éveillé les coqs du voisinage ?

« Piétinez-vous dans la boue comme le porte-faix, sous une charge qui suffirait à écraser une bête de somme ?

« Restez-vous courbés sur le sillon, comme le moissonneur, pendant seize heures de soleil ?

« Vos femmes ont-elles durci la semelle de leurs pieds sur la grève des fleuves, et vont-elles laver les lessives ?