Page:Œuvres de Chapelle et de Bachaumont.djvu/94

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La Sainte37 a si long-temps mouillé

Des larmes de sa pénitence.

Mais, si d’une adresse admirable
L’Ange a taillé ce roc divin,
Le Démon, cauteleux et fin,
En a fait l’abord effroyable,
Sachant bien que le Pèlerin
Se donneroit cent fois au diable,
Et se damneroit en chemin.

Nous y montâmes cependant avec de la peine par une horrible pluie, et, par la grâce de Dieu, sans murmurer un seul moment ; mais nous n’y fûmes pas sitôt arrivés qu’il nous prit sans savoir pourquoi une extrême impatience d’en sortir. Nous examinâmes donc assez brusquement la bizarrerie de cette demeure, et nous nous instruisîmes en un moment des religieux, de leur ordre, de leurs coutumes et de leur manière de traiter les passants : car ce sont eux qui les reçoivent et qui tiennent hôtellerie.

L’on n’y mange jamais de chair,
L’on n’y donne que du pain d’orge
Et des œufs, qu’on y vend bien cher.
Les moines hideux ont de l’air
De gens qui sortent d’une forge.
Enfin, ce lieu semble un enfer,
Ou pour le moins un coupe-gorge.


37. Sainte Magdeleine, qu’une tradition dit s’être retirée sur ce rocher pour se mettre à couvert de la persécution des juifs et des payens.