Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/440

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clairement et distinctement de la sorte que nous, à qui elle paroît blanche ; il reste donc que, si on en peut avoir, ce soit seulement des choses que l’esprit conçoit clairement et distinctement.

Or entre ces choses il y en a de si claires et tout ensemble de si simples, qu’il nous est impossible de penser à elles que nous ne les croyions être vraies ; par exemple, que j’existe lorsque je pense, que les choses qui ont une fois été faites ne peuvent n’avoir point été faites, et autres choses semblables, dont il est manifeste que nous avons une parfaite certitude. Car nous ne pouvons pas douter de ces choses-là sans penser à elles, mais nous n’y pouvons jamais penser sans croire qu’elles sont vraies, comme je viens de dire ; donc, nous n’en pouvons douter que nous ne les croyions être vraies, c’est-à-dire que nous n’en pouvons jamais douter.

Et il ne sert de rien de dire[1] « que nous avons souvent expérimenté que des personnes se sont trompées en des choses qu’elles pensoient voir plus clairement que le soleil ; » car nous n’avons jamais vu, ni nous ni personne, que cela soit arrivé à ceux qui ont tiré toute la clarté de leur perception de l’entendement seul, mais bien à ceux qui l’ont prise des sens ou de quelque faux préjugé. Il ne sert aussi de rien de vouloir feindre que peut-être

  1. Voyez secondes objections, page 405