Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/448

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rien de vrai de toutes les choses que nous apercevons par les sens ; et ainsi toute la connoissance humaine sera renversée sans aucune raison ni fondement.

Et pour ce qui est de cet argument, que vous comparez avec le mien, à savoir, « S’il n’implique point que Dieu existe, il est certain qu’il existe : mais il n’implique point ; donc, etc., » matériellement parlant il est vrai, mais formellement c’est un sophisme ; car dans la majeure ce mot il implique regarde le concept de la cause par laquelle Dieu peut être, et dans la mineure il regarde le seul concept de l’existence et de la nature de Dieu, comme il paroît de ce que si on nie la majeure, il la faudra prouver ainsi : Si Dieu n’existe point encore, il implique qu’il existe, parcequ’on ne sauroit assigner de cause suffisante pour le produire : mais il n’implique point qu’il existe, comme il a été accordé dans la mineure ; donc, etc. Et si on nie la mineure, il la faudra prouver ainsi : Cette chose n’implique point dans le concept formel de laquelle il n’y a rien qui enferme contradiction : mais, dans le concept formel de l’existence ou de la nature divine, il n’y a rien qui enferme contradiction ; donc, etc. Et ainsi ce mot il implique est pris en deux divers sens. Car il se peut faire qu’on ne concevra rien dans la chose même qui empêche qu’elle ne puisse exister, et que cependant on concevra