Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome IV.djvu/202

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De l’indignation.

L’indignation est une espèce de haine ou d’aversion qu’on a naturellement contre ceux qui font quelque mal, de quelle nature qu’il soit. Et elle est souvent mêlée avec l’envie ou avec la pitié ; mais elle a néanmoins un objet tout différent. Car on n’est indigné que contre ceux qui font du bien ou du mal aux personnes qui n’en sont pas dignes, mais on porte envie à ceux qui reçoivent ce bien, et on a pitié de ceux qui reçoivent ce mal. Il est vrai que c’est en quelque façon faire du mal que de posséder un bien dont on n’est pas digne. Ce qui peut être la cause pourquoi Aristote et ses suivants, supposant que l’envie est toujours un vice, ont appelé du nom d’indignation celle qui n’est pas vicieuse.

Art. 196. Pourquoi elle est quelquefois jointe à la pitié, et quelquefois à la moquerie.

C’est aussi en quelque façon recevoir du mal que d’en faire ; d’où vient que quelques-uns joignent à leur indignation la pitié, et quelques autres la moquerie, selon qu’ils sont portés de bonne ou de mauvaise (476) volonté envers ceux auxquels ils