Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/81

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Ont ſoulevé les dieux & toute la nature.
Pour ſauver un ingrat, tes ſoins pernicieux
Trop longtemps ſur ton peuple ont exercé les dieux :
À tes ſujets enfin ceſſe d’être contraire.
Ah ! Que leur ſert un roi, s’il ne leur ſert de père ?
Leur ſalut déſormais eſt ta ſuprême loi,
Et le ſang de ſon peuple eſt le vrai ſang d’un roi…
Depuis quand tes ſujets t’éprouvent-ils ſi tendre ?
Depuis quand ce devoir… ? L’amour vient te l’apprendre !
Voilà de ces grands ſoins le retour trop fatal :
Tu n’es roi que depuis qu’un fils eſt ton rival ;
Contre lui l’amour ſeul arme tes mains impies ;
Voilà le dieu, barbare ! à qui tu ſacrifies.
Étouffons tout l’amour dont mon cœur eſt épris ;
N’y laiſſons plus régner que la gloire & mon fils.
Sur les mêmes vaiſſeaux préparés pour ſa fuite,
Qu’Érixène à Samos aujourd’hui ſoit conduite.
Allons… & que mon cœur, délivré de ſes feux,
Commence par l’amour à triompher des dieux.