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THÉOLOGICO-POLITIQUE.

tenir ? » Le Christ veut ici convaincre les pharisiens par leurs propres principes, et non pas nous apprendre qu’il y a des démons et un règne des démons. De même il dit à ses disciples (Matthieu, chap. xviii, vers. 10) : « Prenez garde de ne pas mépriser un seul de ces petits, car je vous dis que leurs anges sont dans le ciel. » Le Christ n’a ici d’autre objet que d’apprendre à ses disciples à ne pas être superbes, à ne mépriser personne, et non pas à leur enseigner aucune des choses qu’il ajoute à ce conseil, afin de les mieux persuader. J’entends absolument de la même façon la doctrine et les signes des apôtres, et je ne crois pas nécessaire d’insister davantage sur ce point ; car, si je voulais citer tous les endroits de l’Écriture qui n’ont été écrits qu’en vue de l’homme et pour se mettre à sa portée, et qui ne peuvent être considérés comme des points de doctrine divine sans grand dommage pour la philosophie, je m’écarterais beaucoup de la règle de brièveté que je m’efforce de suivre. Qu’il me suffise donc d’avoir cité quelques passages et d’avoir touché les points les plus généraux ; la curiosité du lecteur fera le reste.

Les deux précédents chapitres sur les prophètes et les prophéties se rapportent étroitement à l’objet fondamental de ce traité, qui est de séparer la philosophie de la théologie ; mais n’ayant traité cette question jusqu’à présent que d’une manière très-générale, je veux me demander encore si le don de prophétie a été exclusivement propre aux Hébreux, on s’il leur a été commun avec les autres nations, et en même temps ce qu’il faut penser de la vocation des Hébreux. C’est l’objet du chapitre suivant.


CHAPITRE III


DE LA VOCATION DES HÉBREUX, ET SI LE DON DE PROPHÉTIE
LEUR A ÉTÉ PROPRE

La vraie félicité, la béatitude consiste dans la seule jouissance du bien, et non dans la gloire dont un homme