Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
THÉOLOGICO-POLITIQUE.

pas non plus la croyance aux récits historiques, si légitime qu’elle soit, qui peut nous donner la connaissance de Dieu, ni par conséquent l’amour de Dieu, qui en tire son origine ; cette connaissance, nous la puisons dans les notions universelles qui se révèlent par elles-mêmes et emportent une certitude immédiate ; tant il est vrai que la croyance aux récits historiques n’est pas une condition nécessaire pour parvenir au souverain bien. Toutefois, bien que les récits historiques soient incapables de nous donner la connaissance et l’amour de Dieu, je ne nie point que la lecture de ces récits ne nous soit très-utile dans la vie sociale. Plus en effet nous observons, et mieux nous connaissons les mœurs des hommes, que rien ne nous dévoile plus sûrement que leurs actions, plus il nous est facile de vivre en sûreté dans leur commerce, et d’accommoder notre vie et notre conduite à leur génie, autant qu’il est raisonnable de le faire. 3° Nous voyons aussi que cette loi divine naturelle ne nous demande pas de cérémonies, c’est-à-dire cette sorte d’actions, de soi indifférentes, et qu’on n’appelle bonnes qu’à la suite d’une institution, ou si l’on veut, qui représentent un certain bien nécessaire au salut, ou enfin, si l’on aime mieux, dont la raison surpasse la portée de l’esprit humain. Car la lumière naturelle n’exige rien de nous qu’elle ne soit capable de nous faire comprendre et qu’elle ne nous montre clairement comme bon en soi ou comme moyen d’atteindre à la béatitude. Et quant aux actions qui ne sont bonnes que par le fait d’une institution qui nous les impose, ou en tant que symboles de quelque bien réel, elles sont incapables de perfectionner notre entendement ; ce ne sont que de vaines ombres, qu’on ne peut mettre au rang des actions véritablement excellentes, de ces actions filles de l’entendement, qui sont comme les fruits naturels d’une âme saine. Mais il est inutile d’insister plus longuement sur ce point. 4° Nous voyons enfin que le prix d’avoir observé la loi divine, c’est cette loi elle-même, savoir : de connaître