Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/240

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Sichem[1], et que Siméon et Lévi étaient âgés tout au plus de onze ou douze ans quand ils pillèrent une ville, et en passèrent tous les habitants au fil de l’épée. Mais il est inutile de pousser plus loin cet examen du Pentateuque, puisqu’un peu d’attention suffit pour faire voir que tout dans ces cinq livres, préceptes et récits, est écrit pêle-mêle et sans ordre, que la suite des temps n’y est point observée, que les mêmes récits reviennent à plusieurs reprises, et souvent avec de graves différences, en un mot que cet ouvrage n’est qu’une réunion confuse de matériaux que l’auteur n’a point eu le temps de classer et d’ordonner régulièrement. Il faut en dire autant des sept livres qui suivent le Pentateuque. Qui ne voit, par exemple, au chapitre II des Juges, qu’à partir du verset 6, l’auteur compile un nouvel historien (qui avait également écrit la vie de Josué), et le copie littéralement ? En effet, au dernier chapitre de Josué, nous trouvons le récit de sa mort et de son ensevelissement ; or, au commencement de ce livre, l’auteur avait promis de raconter les événements qui suivirent la mort de Josué. Si donc il avait voulu, en commençant le livre des Juges, reprendre le fil de son récit, pourquoi aurait-il recommencé à nous parler de Josué ? Il n’est pas moins évident que les chapitres XVII, XVIII, etc., du livre I de Shamuel ne sont pas empruntés au même historien que l’auteur avait suivi jusque-là ; car on explique dans ces chapitres tout autrement qu’au chapitre XVI du même livre pourquoi David commença à fréquenter la cour de Saül. Au chapitre XVI, Saül, par le conseil de ses serviteurs, mande David auprès de lui ; ici les choses se passent tout autrement : le père de David l’envoie vers ses frères au camp de Saül ; et David engage avec le Philistin Goliath un combat d’où il sort victorieux, ce qui le fait connaître au roi, et l’introduit dans son palais. Je soupçonne encore qu’au chapitre XVI de ce même livre, l’auteur répète, sous l’impression

  1. Voyez les Notes marginales de Spinoza, note 16.