Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/305

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prescrit les lois en tant que prince, ou s’il les enseigne comme des vérités éternelles, si c’est en vertu de son libre arbitre ou par la nécessité du décret divin que l’homme obéit à Dieu, et enfin si la récompense des bons et le châtiment des méchants sont quelque chose de naturel ou de surnaturel. Pour ces questions et pour d’autres semblables, peu importe à la foi, je le répète, dans quelque sens que chacun les comprenne, pourvu toutefois que l’on n’en prenne pas prétexte pour s’autoriser davantage dans le péché ou pour obéir moins strictement à Dieu. Il y a plus : c’est que chacun, comme nous l’avons déjà dit, doit mettre à sa portée ces dogmes de la foi, et les interpréter de manière à pouvoir plus facilement les embrasser sans hésitation et avec une adhésion pleine et entière, de sorte qu’en conséquence il obéisse à Dieu de tout son cœur. Car de même que la foi, ainsi que nous l’avons déjà dit, fut anciennement révélée et écrite selon l’esprit et les opinions des prophètes et du peuple de cet âge, ainsi chacun aujourd’hui est tenu de l’approprier à ses opinions, pour l’embrasser sans répugnance et sans aucune hésitation ; car nous avons fait voir que la foi ne demande pas tant la vérité que la piété, et qu’elle n’est pieuse et salutaire qu’en raison de l’obéissance, et conséquemment que personne n’est fidèle qu’en raison de l’obéissance. Aussi ce n’est pas nécessairement celui qui expose les meilleures raisons qui fait preuve de la foi la meilleure, mais bien celui qui accomplit les meilleures œuvres de justice et de charité. Je laisse à juger à tous de la bonté de cette doctrine, combien elle est salutaire, combien elle est nécessaire dans un État pour que les hommes y vivent dans la paix et la concorde, enfin combien de causes graves de troubles et de crimes elle détruit jusque dans leurs racines. Et ici, avant d’aller plus loin, il est bon de remarquer qu’avec les explications données tout à l’heure nous pouvons facilement résoudre les objections que nous nous sommes proposées au chapitre I, quand nous avons fait mention de Dieu parlant