Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le droit et le pouvoir d’administrer l’État selon les lois déjà expliquées, selon les réponses déjà transmises. (Sur ce sujet, voyez les Nombres, chap. XXVII, vers. 21[1].)

Pour plus de clarté, je vais exposer ici point par point l’organisation du gouvernement hébreu. D’abord il fut ordonné au peuple de bâtir un édifice qui fût comme le palais de Dieu, c’est-à-dire de la souveraine majesté de l’État ; et cet édifice fut construit non pas aux frais d’un seul homme, mais du peuple tout entier, afin que le lieu où Dieu devait être consulté appartînt également à tous. Ce palais divin eut en quelque sorte pour officiers et pour administrateurs les Lévites, entre lesquels Moïse choisit, pour être chef suprême après Dieu, son frère Aharon, auquel ses fils devaient légitimement succéder. Ce chef, le premier après Dieu, fut chargé d’interpréter les lois, de transmettre au peuple les réponses de l’oracle divin, et d’offrir des sacrifices à Dieu pour le peuple. S’il eût ajouté à toutes ces prérogatives le pouvoir exécutif, il ne lui eût plus rien manqué pour être souverain absolu ; mais cela lui fut refusé ainsi qu’à toute la tribu de Lévi, qui, loin d’avoir en main aucun pouvoir, ne reçut pas même, comme les autres tribus, une portion de terre qui lui appartînt en propre et dont elle pût tirer sa subsistance. Moïse voulut que le peuple tout entier contribuât à sa nourriture, et en même temps environnât de respects et d’honneurs cette tribu, seule consacrée au culte de Dieu. Ensuite, les douze autres tribus formèrent une milice et reçurent ordre d’envahir la terre de Chanaan, de la diviser en douze parties, et de les tirer au sort entre les tribus. Pour cela on choisit douze chefs, un dans chaque tribu, lesquels, avec Josué et le souverain pontife Éléazar, furent chargés de diviser les terres en douze parties et de les distribuer par la voie du sort. Josué fut élu le chef suprême de la milice, et à lui seul fut conféré le droit, d’abord de consulter Dieu dans les nouvelles

  1. Voyez les Notes marginales de Spinoza, note 33.