Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/382

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successeur dans le commandement suprême, mais il en distribua les diverses fonctions de telle sorte que ceux qui vinrent après lui semblaient des officiers administrant un État dont le roi serait absent, et non pas mort. Dans le second empire, les pontifes possédèrent sans limites le droit en question, lorsqu’ils eurent ajouté à la puissance pontificale la puissance administrative. Le droit pontifical fut donc toujours dans la dépendance de la souveraine autorité, et les pontifes ne le possédèrent absolument qu’avec l’administration de l’État. Il y a mieux : le droit relatif aux choses sacrées appartint d’une manière absolue aux rois (comme cela résultera clairement de la fin de ce chapitre), avec cette unique exception qu’il ne leur était pas permis de mettre les mains dans les cérémonies du temple, parce que tous ceux des Hébreux qui ne se rattachaient pas par leur généalogie à Aharon étaient considérés comme profanes. Mais rien de cela ne s’est conservé dans le christianisme. Aussi ne pouvons-nous pas douter qu’aujourd’hui les choses sacrées (pour l’administration desquelles on considère les mœurs de chacun, non la famille dont il descend, et qui par conséquent n’excluent pas à titre de profanes ceux qui ont l’autorité en main) ne relèvent exclusivement du souverain. Personne ne peut recevoir que de la volonté ou du consentement du gouvernement le droit et le pouvoir d’administrer les choses du culte, d’en choisir les ministres, d’établir et de consolider les fondements de l’Église et la doctrine qu’elle enseigne, de juger des mœurs et des actions pieuses, de retrancher quelqu’un de la communauté des fidèles ou de recevoir quelqu’un dans le sein de l’Église, enfin de pourvoir aux besoins du pauvre ; et toutes ces choses ne sont pas seulement vraies (comme nous l’avons prouvé), mais de plus elles sont strictement nécessaires tant à la religion qu’au salut de l’État. Qui ne sait combien le droit et l’autorité touchant les choses sacrées imposent au peuple, avec quelle docilité, quel respect chacun recueille les