Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/128

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jusqu’à ce que l’on obtienne la certitude touchant ce qui doit arriver.

Scholie II : Ce qui précède nous fait comprendre ce que c’est qu’espérance, crainte, sécurité, désespoir, contentement et remords. L’espérance n’est autre chose qu’une joie mal assurée, née de l’image d’une chose future ou passée dont l’arrivée est pour nous incertaine ; la crainte, une tristesse mal assurée, née aussi de l’image d’une chose douteuse. Maintenant, retranchez le doute de ces affections, l’espérance et la crainte deviennent la sécurité et le désespoir, c’est-à-dire la joie ou la tristesse nées de l’image d’une chose qui nous a inspiré crainte ou espérance. Quant au contentement, c’est la joie née de l’image d’une chose passée qui avait été pour nous un sujet de doute. Enfin, le remords, c’est la tristesse opposée au contentement.


PROPOSITION XIX

Celui qui se représente la destruction de ce qu’il aime est saisi de tristesse ; s’il s’en représente la conservation, il éprouve de la joie.

Démonstration : L’âme s’efforce, autant qu’il est en elle, d’imaginer ce qui augmente ou favorise la puissance d’agir du corps (par la Propos. 12, partie 3), en d’autres termes (par le Schol de la même Propos.), ce qu’elle aime. Or, l’imagination est favorisée par tout ce qui implique l’existence de son objet, et empêchée par tout ce qui l’exclut (par la Propos. 17, part. 2) Donc, les images des choses qui impliquent l’existence de l’objet aimé favorisent l’effort de l’âme pour imaginer cet objet ; en d’autres termes (par le Schol. de la Propos. 11, partie 3), elles réjouissent l’âme. Au contraire, les images des choses qui excluent l’existence de l’objet aimé empêchent cet effort de l’âme, c’est-à-dire (par le même Schol.) l’attristent. Par conséquent, celui qui se représente la destruction de ce qu’il aime sera saisi de tristesse, etc. C. Q. F. D.


PROPOSITION XX

Celui qui se représente la destruction de ce qu’il hait sera saisi de joie.

Démonstration : L’âme (par la Propos. 13, partie 3) s’efforce d’imaginer tout ce qui exclut l’existence des choses capables