Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/391

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ni richesses, mais la vérité toute nue et la tranquillité qu’elle mène à sa suite ; qui préfère à toutes les vérités et à toutes les sciences la métaphysique, ou du moins la partie principale de la métaphysique, et qui met tout le bonheur de sa vie à consacrer à cette étude les heures de ses loisirs. Personne, j’en suis certain, n’est aussi heureux que vous, personne n’a poussé aussi loin ses recherches et n’a conquis la perfection où je vois par votre livre que vous êtes arrivé. Pour vous dire un dernier mot de moi, je suis un homme qu’il ne tiendra qu’à vous de mieux connaître, si vous voulez l’attacher à vous par le lien le plus fort, en éclairant sa pensée, et en perçant, pour ainsi dire, le nuage qui l’obscurcit.

Je reviens à votre traité. En même temps que j’y ai trouvé le plus souvent une nourriture qui flattait agréablement mon palais, j’y ai rencontré aussi quelques mets d’une digestion plus difficile. Je ne sais s’il convient à un inconnu de vous apporter ainsi ses objections, et si une telle importunité trouvera grâce à vos yeux ; c’est ce qui fait que je commence par vous écrire et par vous demander, dans le cas où les veillées d’hiver vous laisseraient quelque loisir et où vous seriez disposé à répondre aux difficultés que me laisse votre livre, si vous me permettez de vous exposer mes scrupules. Bien entendu que cela ne mettra pas obstacle à une occupation plus importante et ne vous gênera en aucune façon ; car ce que j’ai à cœur par-dessus tout, c’est de vous voir exécuter votre promesse et développer plus au long votre doctrine. J’aurais eu l’honneur de vous saluer moi-même et de vous exposer de vive voix ce que je vous écris ; mais l’ignorance où je suis de votre adresse, une maladie qui se gagne et les devoirs que j’ai à remplir m’en ont empêché et m’ont fait différer ma visite.

Pour que cette lettre ne soit pas entièrement vide, et dans l’espérance que je ne vous déplairai pas, je vous soumettrai une observation. Vous dites en divers endroits des Principes et des Pensées métaphysiques, soit en votre